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Le p'tit nain
« Allez, rase-bitume, tire-toi ! Les sixièmes, c’est là-bas !
(…)
- Eh ! T’as entendu ? Les p’tits nouveaux, c’est là-bas, sous le préau !
Je le sais bien qu’on les rassemble sous le préau, les futurs élèves de sixième, le principal l’a annoncé assez fort dans son mégaphone !
Comme il a annoncé que l’appel des classes de cinquième serait fait à la cantine et celui des classes de quatrième devant le garage à vélos. C’est donc vers là que je me suis dirigé, parce que c’est en classe de quatrième que j’entre, même si je ne mesure qu’un mètre trente-cinq. Et n’allez pas croire que je suis un surdoué qui fait sa scolarité avec trois ans d’avance. Non, j’ai treize ans, comme tout le monde. Mais je ne suis pas très grand pour mon âge, voilà tout ! Je suis même franchement petit. » (p.7-8)
« C’est une fille qui s’exclame :
- Oh dis donc, il est drôlement petit ! Il est encore plus petit que les sixièmes !
(…)
Elle n’a peut-être pas parlé méchamment mais, derrière moi, les autres s’en donnent à coeur joie.
- Pire que ma sœur qui est en CM2 !
- Eh, Thomas, tu es battu cette fois !
- Il est plus petit que Maÿlis !
- C’est un nain !
Voilà, le mot est lâché : nain ! Qu’est-ce que ça veut dire, nain, d’abord ? J’ai seulement un « retard de croissance dû à un problème d’hypophyse ». D’abord, je suis suivi et soigné, ensuite je suis « petit mais harmonieux ». (p.14)
« - Alors, le p’tit nain, lance Pédro, on se fait chouchouter par les filles, on appelle sa mère, on a peur des copains de la classe ?
- T’es mieux avec les gonzesses, hein, minus, c’est plus ton genre ? Dit l’un des deux petits malins.
- Ouais, c’est mademoiselle Maxime !
- Y se sont gourés tes parents, c’est pas Max qu’ils auraient dû t’appeler ! Comme maximum, t’es pas terrible, c’est plutôt du minimum chez toi ! reprend Pédro.
Et Gentilhomme, eh ! C’est pas terrible non plus ! C’est pas gentil que t’es, c’est petit, c’est Petithomme qu’on devrait t’appeler, dit le deuxième petit malin. » (p.32)
« - Eh, le nain, t’arrête de gigoter ?
Il en a de bonnes Pédro, ils sont tous là à me bourrer ! J’en ai marre, à la fin, qu’est-ce qu’ils veulent ? Que je prenne d’un coup trente centimètres, pour leur faire plaisir ? Je ne demande pas mieux, moi ! Du coup, j’éclate :
- Qu’est-ce que tu veux, Pédro ? Qu’est-ce que vous me voulez ? Je suis petit, bon, j’y peux rien ! Y en a qui sont gros, d’autres qui sont noirs, d’autres qui sont nés en Algérie, on n’y peut rien, c’est comme ça !
- Quoi Qu’est-ce que t’as contre les Arabes ? Lance un Maghrébin qui m’a attrapé par le col de ma chemise.
- Mais… lâche-moi ! J’ai rien contre eux ! Je dis qu’il y en a qui sont algériens et d’autres pas et voilà ! Et Pédro il est portugais, et alors ? C’est comme ça, on va pas lui taper dessus pour autant ! » (p.36-37)
« - Alors le nain ? On barbote ?
C’est Nathan qui vient d’arriver à vélo.
Nathan, quand nous sommes seuls, il m’appelle le nain, parfois, et c’est une façon de me dire qu’on est des potes. Un mot, c’est fou comme il peut changer de sens, suivant qui le dit et comment il le dit. » (p.90)
(Mini Max et maxi durs de Roselyne BERTIN)
Tags : harcèlement scolaire, discrimination, apparence, racket, humiliation
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