• « Je, ça n’existe pas »

     « Lorsqu’on découvre qu’on est seul, vraiment seul, je crois que le plus souvent on panique. On se jette dans la situation exactement opposée et on se mêle à un groupe : club, équipe, association. On commence à s’habiller exactement comme les autres. C’est un moyen de se rendre invisible. La façon de coudre ses pièces sur les trous des jeans devient d’une importance incroyable. Si elles ne sont pas cousues comme il faut, vous n’y êtes pas. Vous devez y être. Y être. Vous avez remarqué comme ces mots sont bizarres ? être où ? être avec eux. Avec les autres. Tous ensemble. C’est le nombre qui fait la force. Je, ça n’existe pas. Je suis un insigne de basket-ball, le boute-en-train de la classe, l’ami de mes amis. Je suis une excroissance de cuir noir sur une Honda. Je suis dans le coup. Je suis un jeune à la page. Vous ne pouvez pas me voir. Ce que vous voyez, c’est nous. Seulement nous. Ensemble, peinards.

     « Je, ça n’existe pas »

    Et si Nous Vous apercevons, vous là-bas, tout seul dans votre coin, ou bien la chance est avec vous et nous vous ignorerons, sinon il se pourrait bien que nous vous lancions des pierres. Car nous n’aimons pas ceux qui ont sur leurs jeans des pièces différentes des nôtres, et qui nous rappellent que chacun de nous est seul, qu’aucun d’entre nous n’est peinard. » (p.9-10)

      

    « Je n’ai pas expliqué tout cela à Natalie ce soir-là, bien sûr, mais nous avons quand même parlé un peu du lycée, du conformisme et de la difficulté d’être différent. C’est comme si, me dit-elle, nous n’avions pas d’autre choix que de vouloir être ce que sont les autres ou bien ce que les autres veulent que nous soyons. Il faut se conformer ou obéir. » (p.40)

      

    « Ce que [ma mère] voulait, c’était primo que je sois vivant, secundo que je sois normal. J’étais vivant et j’accomplissais à peu près tout ce qu’elle attendait de moi. Si mes efforts n’aboutissaient pas à faire de moi un type normal, ils réussiraient au moins à en produire une honnête imitation pendant une bonne cinquantaine d’années. » (p.76)

     

     « Il était parfois plus facile de mentir que de dire la vérité. Si j’avais dit à Jason que je n’avais pas envie d’aller au cinéma, il aurait discuté pour essayer de me convaincre. Et si je disais que j’allais entendre un concert, mes parents, tout autant que Jason, trouveraient que c’était là une étrange façon de passer sa soirée. Et j’étais écoeuré, fatigué d’être toujours le seul à faire des choses étranges. » (p.81)

     

      (Loin, très loin de tout d’Ursula LE GUIN)

     

     

    « Éviter de devenir adulteLe p'tit nain »
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