• Une solution pour mourir

     

    « Quelques jours avant, j'avais vu à la télévision un reportage sur un adolescent qui s'était immolé par le feu. Il était mort de ses brûlures. C'était en France, ça m'a frappé.

     

    Comme je savais qu'il en était bien mort, j'ai décidé de faire la même chose. Ça ne m'a pas fait peur, parce que je me disais qu'il fallait que ça s'arrête. Je ne pouvais plus vivre comme ça. La mort ne me faisait plus peur. Je me disais qu'avec toute la douleur que j'endurais depuis plus de deux ans, un feu qui dure quinze minutes, c'était ce qu'il me fallait.

     

    J'avais pensé aussi aux médicaments, et à beaucoup d'autres façons. J'avais songé à l'électricité. Me jeter d'un pont où passent le chemin de fer et les TGV. J'y avais bien réfléchi et j'étais même allé voir les possibilités près de la gare de Lille-Flandres où, justement, il y a un pont. Je me voyais sauter sur les lignes à haute tension. J'avais entendu dire qu'on était directement électrocuté. Mais il ne fallait pas rater les lignes. Et je n'étais pas très sportif.

     

    Une solution pour mourir

     

     

    Depuis un an au moins, je cherchais une solution pour mourir. Sur internet, je parcourais les sites sur le sujet qui expliquaient comment faire pour se suicider. Cela semblait facile et je les avais trouvés en tapant juste : « Comment se suicider. » Sur certaines vidéos de YouTube, on voyait des gens qui avaient sauté d'un pont et qui étaient morts électrocutés. J'avais en tête de choisir le moyen le plus efficace. Le plus sûr. Pour les médicaments, ils donnaient des noms et lesquels prendre. Ils parlaient aussi de la pendaison, ou de se couper les veines. J'ai abandonné l'idée des médicaments, trop compliquée : il fallait les obtenir d'un médecin, par ordonnance, et ensuite les acheter dans une pharmacie. Comme je n'étais pas malade et que je n'avais jamais vu de psychiatre, j'ai renoncé. J'ai été tenté un moment par l'idée de me pendre, mais j'avais peur que ce ne soit pas assez rapide. Ce jour-là, je voulais faire vite. Disparaître en fumée.

     

     

     

    J'ignorais ce que c'était la dépression. Je ne savais qu'une chose : ma vie était mauvaise, insupportable, et mourir était la solution pour arrêter. Me retrouver dans un autre monde, au calme, un monde que j'imaginais sans méchanceté, sans école. Je pensais tous les jours au suicide. Le soir, surtout, quand j'étais tout seul dans ma chambre. Et la journée aussi, quand je me faisais embêter à l'école, frapper, racketter, traiter de gros cochon, de bon à rien. Pour moi, la mort, c'était le calme, ne plus rien faire, ne plus se faire embêter... la liberté. Disparaître, ça ne me faisait rien. Sauf que je pensais beaucoup à ma famille. Je savais que j'allais leur faire de la peine : ils m'aimaient. Mais peut-être que c'était mieux de mourir, pour un fils aussi nul dans la vie. Je me disais que pour moi, ce serait la liberté. Plus d'école, plus d'insultes, plus de coups, et plus rien à apprendre. Avec tout ce qui se passait dans l'école, et à côté de l'école, le racket, l'humiliation, pour moi, mourir, ce n'était pas le pire. Mourir était la délivrance. Mourir était devenu ma seule et unique pensée. » (p.13-15)

     

     

     

    (Condamné à me tuer de Jonathan DESTIN)

     

     

     

    « Le faitageLes échelles cartographiques »
    Partager via GmailGoogle Bookmarks Blogmarks

    Tags Tags : , , , ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :