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Une question d'honneur
« écoutez-moi. Je ne prends pas la défense de mon fils. Ce qu'il a fait n'est pas très malin. (…) Donc, voilà, passons. Cette histoire de fauteuil n'a aucun intérêt.
Par contre, ce qui est très important , et je sais que ce que je vais vous dire peut vous sembler choquant, mais j'y crois vraiment, c'est que Valentin, ce matin, s'est bien comporté avec votre fils. Il s'est bien comporté parce qu'il n'a établi aucune différence entre eux deux. Et vous savez pourquoi ?
Mais parce qu'il n'en voit pas, j'imagine.
Maxime, pour Valentin, n'est ni faible ni vulnérable . C'est un gamin exactement comme les autres et qui doit donc subir la même dure loi de la cour de récréation que les autres. Il n'a pas fait de discrimination ni même de discrimination POSITIVE comme nous disons, nous adultes qui cherchons toujours à tout discriminer. Non, il l'a traité en égal. Pour des raisons que nous ignorons, et qu'il faut ignorer var les secrets d'enfant sont sacrés, Valentin a eu besoin de s'en prendre à votre fils. S'il avait pu, il l'aurait brutalisé, lui aurait fait un croche-pied, donné un coup dans l'épaule ou que sais-je encore, mais comme il ne le pouvait pas, il s'en est pris à son fauteuil. C'était de bonne guerre.
C'était de bonne guerre et je dirais même : c'est sain.
Nos enfants s'envisagent sur un pied d'égalité et nous avons tort (…) d'accorder une si grande importance à un événement aussi banal. Si Valentin s'était empoigné avec un autre gamin dans la cour (…) auriez-vous convoqué ainsi les parents en simulant une espèce d'état d'urgence ?
Non. Bien sûr que non. L'adulte qui les surveillait les aurait séparés et voilà tout. Et bien là, c'est pareil. C'était un simple croche-pied, ni plus ni moins. (…)
Je vous le redis, je n'excuse pas mon fils, je ne l'excuse pas et je souhaite aussi qu'il soit puni, mais je maintiens que loin d'humilier le vôtre, il lui a, en crevant sa roue, rendu honneur. » (p.170-171)
(Fendre l'armure d'Anna GAVALDA)
Tags : handicap, fauteuil roulant, discrimination
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Commentaires
Ce qui est assez hallucinant c'est que certains parents, enseignants, adultes en général, voire enfants et adolescents, pensent effectivement que la loi de la récré est dure et que c'est comme ça. C'est normal, entré dans les mœurs, les enfants - surtout les garçons, restons dans les clichés - se tapent dessus et on les sépare vite fait jusqu'à ce qu'ils recommencent. Désespérant.
Peut-on faire changer cela d'une manière ou d'une autre ?