•  « T’étais un mec dans mon lycée, genre populaire. T’arrêtais pas d’insister pour qu’on aille boire un verre. Tu disais que j’étais différente des autres et que tu aimais mon côté noir… Un soir j’ai fini par dire oui. Tu voulais qu’on passe d’abord chez toi, tu m’as servi un verre et je me suis sentie bizarre. Une minute après, je ne pouvais plus bouger et tu étais sur moi. »

     J’ai pas su quoi dire.

     « Et évidemment, après, tu as mis une photo de moi à poil sur Facebook en te vantant d’avoir niqué la vampire du Lycée... »

     Je savais toujours pas quoi dire. » (p.69)

     

    « D’abord il y a eu mon oncle, quand j’étais petite. Et puis ce mec de mon lycée, le soir où il m’a droguée. Et tous ses copains me sont passés dessus après lui. » (p.158)

     

    Le harcèlement sur Facebook

     

    « Au lycée, il y avait tous ces élèves qui m’appelaient Vico la patate.. »

     « Pourquoi tu ne les as pas simplement ignorés ? »

     « Doc, vous étiez au lycée dans les années cinquante ou quelque chose comme ça. À l’époque, y avait pas les smartphones, Facebook, Twitter... Quelqu’un a fait un montage Photoshop de ma tête avec une grosse patate à la place de mon corps... Elle a circulé partout, TOUT le lycée l’a vue. Et quand on me croisait, on disait : « Hey regarde, c’est Vico la patate ! »

     Une fois, c’est même arrivé alors que j’étais au supermarché. Ensuite, j’ai commencé à recevoir des messages qui disaient : « Débarrasse la Terre de tes kilos »,« Suicide-toi le gros »... Alors un soir, j’ai voulu le faire ! »

     Le Doc s’est gratté la barbe.

     « De plus en plus d’adolescents me parlent du harcèlement sur Facebook... » (p.72)

     

     (Coeur battant d’Axl Cendres)

     

    Partager via GmailGoogle Bookmarks Blogmarks

    votre commentaire
  • « Ces témoignages mettent en évidence au moins trois aspects relatifs au vote. premièrement, ils participent à se défaire du "modèle normatif d'un citoyen autonome de sa volonté (Mariot, 2010)" : les personnes avec le droit de vote ne sont pas des êtres purement rationnels dont les manières de faire, les valeurs et les opinions seraient des attributs individuels uniquement construits par la personne elle-même ; comme tous les autres citoyens, les personnes vivant avec un handicap sont dans un jeu d'interactions et d'interlocutions les uns avec les autres, recherchent la mise en relation ou au contraire l'évitent. Deuxièmement, ces témoignages m'amènent à analyser l'acte de vote non pas uniquement comme un droit, un devoir, un acte civique technique ou politique, mais également comme un acte social qui vient produire de la sociabilité ou au contraire la détériorer. Cette sociabilité ne se fait pas uniquement avec les proches (amis, famille, pairs, etc.) mais également avec les professionnels qui les accompagnent.

    Troisièmement (...) : la charge émotionnelle du débat et des prises de position. Le risque de la dispute et la confrontation des idées est également vrai pour n'importe quelle personne, dans tous les cercles familiaux ou professionnels. Certaines personnes en tutelle ont donc bien conscience qu'elles doivent se protéger de ce risque en prenant des précautions ; elles connaissent l'impact que cela a sur les relations. » (p.51-52)

     

    Le jeu des interactions sociales

    « Certaines des personnes protégées interrogées n’ayant pas le droit de vote ont décrit ce que j’appellerai un jeu d’interactions sociales :

    « A l’ESAT, on évite de parler politique parce qu’on s’engueule. C’est chaud le sujet politique, ça crée du débat. Je n’ai pas le droit de vote, mais ça ne m’empêche pas d’avoir un avis. Des fois, je ne suis pas d’accord. J’écoute et je dis que je ne suis pas d’accord. »

    (Personne vivant avec un trouble psychique en tutelle. Extrait de carnet de terrain, 20 avril 2017)

     

    Ce témoignage n’est pas nécessairement représentatif de toutes les personnes à qui le droit de vote a été retiré. Toutefois, il montre qu’une dynamique entre pairs est possible, y compris pour ces personnes protégées n’ayant pas le droit de vote. » (p.89)

     

    « D’un côté, certains parents se sont demandé quel sens peut avoir le vote d’une personne ne comprenant pas ce qu’est une élection, un Etat, un gouvernement, un maire, un président de la République, etc. Ce type de perception tend à faire apparaître les limites de la dynamique de réciprocité dans la relation entre un aidant et un aidé. Elle n’est pas incompatible avec le fait d’éventuellement accepter que la personne aidée puisse avoir le droit de vote. Toutefois, dans tous les cas, pour ces parents, la mise en œuvre de ce droit serait inopérante car il n’y aurait pas d’accès social possible à ce droit. Ainsi, cette version maintiendrait, de fait, une situation d’exception au regard du droit, et donc une altérité, une dysmétrie, deux mondes différents et dissociés entre les personnes qui peuvent voter ou non, tout en ayant le souci de la personne.

    A L’autre extrémité, certains parents ont revendiqué le droit de pouvoir voter en leur nom et au nom de leur enfant qui ne pouvait se présenter par lui-même. Dans ce cas, il n’y a pas véritablement de processus de prise de distance : les convictions politiques de la personne aidante sont très probablement indifférenciables de celles de la personne aidée, tout en assurant le respect de l’individualité et du soin apporté à cette dernière.

    D’autres proches ont juste mentionné la portée symbolique de ce droit sans considérer pour autant que la personne l’exercerait. Cette posture traduit bien une forme d’empathie, d’attention, d’écoute et de responsabilité mais elle ne se couple pas nécessairement à un engagement et un investissement de la part de la personne aidante pour accompagner au vote. » (p.108)

     

    « Tendre pleinement vers ce modèle décalé et alternatif demanderait de sortir d’un raisonnement binaire ; autonomie versus assistance, handicap versus valide, faire avec versus faire à la place de, intégration versus exclusion, inclusion versus institution, médical versus social, aide versus soin, etc. Nous diriger vers une société recourant à une éthique de la vulnérabilité demanderait à la société d’appréhender les catégories qui composent les configurations de handicap dans ce qu’elles ont de récursives avec l’ensemble des citoyens. (…) Ces catégories seraient récursives si elles étaient appréhendées dans un mouvement mutuel avec la construction de la société, si on cherchait non plus à adapter la société à une catégorie de la population mais si on essayait de repenser toute la société avec ces catégories pour envisager une autre version de nos structures et dynamiques sociales. Pour ce faire, ces catégories sont à envisager comme produit et effet l’une de l’autre : alors elles se confronteraient et s’opposeraient, mais aussi se combineraient ou s’interpréteraient. » (p.125)

     

    (Vote et handicap de Cyril DESJEUX)

     

    Partager via GmailGoogle Bookmarks Blogmarks

    votre commentaire
  •  « Je pensais au destin – j’y crois – qu’on l’appelle Nature ou Dieu ou Fatalité, toujours est-il qu’il est des mécaniques contre lesquelles on ne peut rien. Certains naissent pour réussir, briller, se distinguer, ET d’autres… je ne sais pas pourquoi. Peut-être pour servir de point de comparaison. Après tout, pour qu’il y ait des géants, il faut des nains, non ? » (p.10)

     

    « Ricanements – quatre ou cinq hyènes, comme je les appelle, se sont retournées vers moi et leur rire était mauvais. Pas de la moquerie, non, c’était pire que ça. C’est un rire qui bave, qui mord, qui fait saigner, et que je connais par cœur.

      Je n’en voulais pas à Beaulieu, au contraire – ce que j’aime chez elle, c’est précisément son détachement absolu aux marques de distinction : le physique, les fringues, la classe sociale, le métier des parents, le collège de provenance ou les notes, semblent l’indifférer au plus haut point. Elle ne connaît qu’une règle : la sienne, celle qu’elle instaure dans son cours et qu’elle applique de manière intransigeante sans faire de quartier et sans nuance. Ma moyenne de 16/20 en français n’y changeait rien, j’étais bonne pour me coltiner une analyse de texte à la maison.

     Ça n’a pas loupé, pas plus que les remarques à la sortie : « Bah alors, l’intello, t’as pas écouté la maîtresse ? », « En fait, c’est pas une punition, vu que t’es no life et que tu passes ta vie à travailler, elle t’a fait un cadeau, Beaulieu », « Oh la bibliothèque sur pattes, faut suivre en cours, t’es née pour ça ! ».

     Ricanements sur le chemin du cours de maths, couloir du bâtiment C. Je marchais dans le sillage de Margot (un parfum sophistiqué), j’avais l’impression d’être invitée à porter la traîne de ses cheveux blonds, tombant gracieusement sur les formes rebondies de ses fesses parfaites, moulées dans un jean de marque. Elle était entourée de sa cour, véritable princesse de Clèves (le titre du texte dont je venais d’hériter pour faire ma punition) - «et l’on doit croire que c’était une beauté parfaite, puisqu’elle donna de l’admiration dans un lieu où l’on était si accoutumé à voir de belles personnes. »

     

    Un rire qui bave, qui mord et qui fait saigner

    Je ne sais pas si j’aurais mieux supporté le harcèlement moral (je sais aujourd’hui qu’il s’agissait bien de cela, même si les adultes, à commencer par mes parents, relativisaient mes souffrances : c’est l’âge bête, sois plus forte que ça!), sans la présence de Margot qui me narguait par sa seule existence depuis l’école primaire.

     (…)

     J’étais contre les privilèges liés à la naissance, et pas uniquement contre la fortune, cette foutue cuillère en argent destinée aux bébés chanceux, mais contre l’apparence même, contre cette loterie de la génétique qui peut faire de notre vie un paradis ou un enfer. Au premier rang de son succès, je l’étais, donc, parce que non contentes d’avoir été scolarisées au même endroit et d’avoir choisi les mêmes options, nous portions des noms de famille dont l’initiale était identique, nous plaçant régulièrement l’une à côté de l’autre quand tombaient les fameux plans de classe. « Tu te retrouves encore à côté de la bolosse, ma pauvre chérie », lui disait-on de manière à ce que j’entende. « Nous fais pas un burn-out quand même ! » et de rire de plus belle.

     Margot aussi riait, elle a toujours ri. Je ne peux pas dire qu’elle ait cherché à me nuire, simplement elle n’a jamais rien fait pour me protéger. Sauf une fois. C’est vrai.

     Une pyjama party, en classe de cinquième. Je ne savais pas alors que j’avais été invitée pour devenir le centre d’intérêt, le jeu, l’attraction de la soirée. Le but était simple : faire manger le gros tas jusqu’à ce qu’il vomisse. J’ai vomi. On a voulu me faire manger encore, Margot a dit : « ça suffit, ce n’est même plus drôle. » 

     (…)

     L’histoire a circulé, comme les photos prises ce soir-là – mon vomi sur les réseaux sociaux. Durant deux ans, on m’a surnommée « Dégueulis ». Les rares fois où j’ai été invitée par la suite, j’ai décliné. Je ne savais pas quel piège on allait me tendre. Je n’ai pas pris de risque.» (p.10-13) 

      « Les jours suivants, j’ai goûté avec un plaisir indicible cette paix qui m’était offerte. Je découvrais la tranquillité des journées où l’on ne m’adressait pas la parole, où je n’essuyais aucune moquerie, aucune morsure, où je pouvais me rendre d’une salle de cours à une autre sans redouter qu’on me crache au visage l’air de rien. Je n’étais pas transparente, loin de là. Les hyènes me surveillaient du coin de l’oeil, méfiantes, comme si elles avaient découvert brutalement que je n’étais pas le lapin qu’elles croyaient mais ne savaient pas encore à quel genre d’animal elles avaient affaire. » (p.43)

      

    (Le mur des apparences de Gwladys CONSTANT)

     

    Partager via GmailGoogle Bookmarks Blogmarks

    votre commentaire
  •  « Au premier abord... la violence ne se voit pas forcément...
    - Ouvrez l'oeil ! - » (p.11)

       « - Vous avez été excisée. Vous avez une cicatrice à la place du clitoris. Heureusement vos petites lèvres ne sont pas trop abîmées.
    - Et je pourrai faire l'amour ? Est-ce que je pourrai avoir du plaisir ?
    - Vous pourrez avoir une vie sexuelle normale mais... sans orgasme. Moins de plaisir en tout cas.
    Mais des chirurgiens peuvent réparer votre clitoris par une petite intervention. » (p.14)

     

     « - C'est la coutume ! Ils disent que ça nous garde pures.
    - Non, c'est une invention de l'homme pour nous rendre dociles et soumises à leurs désirs !
    - Oui, mais ils disent que c'est la religion qui l'ordonne.
    - Mais c'est faux, et tu le sais bien.
    Le CORAN ne dit rien sur l'excision. C'est un prétexte !
    Ce sont des légendes d'hommes et des rites ancestraux.
    (...)
    - Mais Aïcha dit que les hommes peuvent contrôler notre plaisir sexuel.
    Si on n'a pas de plaisir, on ne sera pas tentées de les tromper. » (p.15)

      

    La violence ne se voit pas forcément...

    « Le Code civil prohibe clairement le mariage contraint : selon l'article 146, "il n'y a pas de mariage lorsqu'il n'y a point de consentement". » (p.21)

       Jeanne PUCHOL :

     « La violence faite aux femmes, si elle ne débouche pas fatalement sur des actes, commence toujours par les mots, des mots qui semble-t-il, et c'est bien le problème, ne sont pas si graves que ça ... » (p.22)

     

     « Le secrétariat d'état à la solidarité reconnaît que 70 000 adolescentes françaises de 10 à 18 ans sont potentiellement menacées de mariage forcé.
    Ce type de mariage est illégal mais peut avoir lieu soit en France soit dans le pays d'origine.
    Qu'il s'agisse d'un mariage traditionnel, non officiel, ou d'un mariage civil, il est subi par des jeunes filles qui sont parfois mineures.
    Ces victimes des mariages forcés sont soumises à des rapports sexuels imposés par leur "mari", donc à des viols perpétrés avec la complicité de la famille. » (p.26)

      

    Isabelle BAUTHIAN :

     Je ne suis pas féministe. Je ne me suis jamais sentie femme, et les agressions dont ces dernières sont victimes ne me touchent pas plus que celles subies par n'importe quel individu opprimé. Mais je crois au droit incompressible de chacun à disposer de sa vie selon ses aspirations et ses qualités propres, et je sais que la féminité y est souvent un obstacle. Je suis convaincue que c'est en abattant les a priori que nous contribuerons à changer les choses. (p.64)

     

     (En chemin elle rencontre…  -  ouvrage collectif)

     

     

     

     

     

    Partager via GmailGoogle Bookmarks Blogmarks

    votre commentaire
  •    « C'est une double peine

       Tu viens de te faire violer donc on a considéré que TON CONSENTEMENT & TON CORPS valaient moins que la pulsion soudaine d'un type.

     Tu décides de ne rien dire et tu as l'impression de faire le jeu des violeurs, en faisant ça.

      

    Alors que c'est pas vrai.

      

    LA VICTIME, C'EST MOI ET C'EST MOI QU'IL FAUT AIDER. » (p.25)

     

    La double peine du viol

     

    « Le viol, c'est quand même le seul crime où on remet SANS CESSE en cause la victime.

     - T'es sûre ??!?

     - T'as vu comment t'étais habillée ?

     - Pourquoi t'as attendu si longtemps ?

     - T'as pas l'air si traumatisée...

      

    Quand tu te fais cambrioler, on te dit pas :

     - Ah oui mais peut-être que tu pouvais mieux fermer la porte ?? !?

      

    MAIS POUR UN VIOL, PAS DE PROBLÈME.

     

    Ça crée aussi une honte associée au viol, personne n'ose en parler.

     T'as honte, mais tu ne devrais pas.» (p27)

      

    Cher corps de Léa BORDIER

     

     

     

    Partager via GmailGoogle Bookmarks Blogmarks

    votre commentaire
  •  « Elle sait qu’ici, dans son pays, les victimes de viol sont considérées comme les coupables. Il n’y a pas de respect pour les femmes, encore moins si elles sont Intouchables. Ces êtres qu’on ne doit pas toucher, pas même regarder, on les viole pourtant sans vergogne. On punit l’homme qui a des dettes en violant sa femme. On punit celui qui fraye avec une femme mariée en violant ses sœurs.

    Le viol comme arme de destruction massive

    Le viol est une arme puissante, une arme de destruction massive. Certains parlent d’épidémie. Une récente décision d’un conseil de village a défrayé la chronique près d’ici : deux jeunes femmes ont été condamnées à être déshabillées et violées en place publique, pour expier le crime de leur frère parti avec une femme mariée, de caste supérieure. Leur sentence a été exécutée. » (p.91)

       

    (La tresse de Laetitia COLOMBANI)

      

    Partager via GmailGoogle Bookmarks Blogmarks

    1 commentaire
  • "Il essayait de trouver une façon d'exprimer à Jerry le lien entre Frère Eugène, la salle dix-neuf et le fait de ne plus jouer au football. Il savait qu'il y avait un lien mais c'était difficile à exprimer.

     "Ecoute, Jerry. Il y a quelque chose de pourri dans cette école. Plus que pourri." Il chercha le mot et le trouva, mais ne voulut pas l'utiliser. Ça n'allait pas avec le paysage, le soleil et le bel après-midi d'octobre. C'était un mot de l'ombre, qui allait avec le vent d'hiver.

     "Les Vigiles ?" demanda Jerry. Il s'était allongé sur la pelouse et regardait la course des nuages dans le ciel bleu d'automne.

     "ça en fait partie", dit Cacahuète. Il aurait voulu courir encore. "Le mal", dit-il.

     "Qu'est-ce que tu as dit ?"

     Dingue. Jerry allait croire qu'il avait perdu le nord. "Rien", dit Cacahuète. "De toute façon, je ne vais plus jouer au football. C'est personnel, Jerry." Il prit une profonde inspiration. "Et je ne vais pas non plus courir le printemps prochain."

     Ils se turent.

     "Qu'y a-t-il, Cacahuète ?" finit par demander Jerry, d'un ton ému rempli d'inquiétude.

     

    "C'est ce qu'ils nous font, Jerry." C'était plus facile à dire parce qu'ils ne se regardaient pas, chacun assis à sa place. "Ce qu'ils m'ont fait cette nuit-là dans la classe...  je pleurais comme un bébé, ce que je ne me serais jamais cru capable de faire. Et ce qu'ils ont fait à Frère Eugène en détruisant sa salle, en le détruisant lui..."

     

    "Allons, t'inquiète pas, Cacahuète."

     "Et ce qu'ils te font à toi...  les chocolats."

     "Ce n'est qu'un jeu, Cacahuète. Prends ça comme une blague. Laisse-les s'amuser. Frère Eugène devait sans doute être au bord de..."

     

    C'est plus qu'une simple blague

    "C'est plus qu'une blague, Jerry. Quelque chose qui peut te faire pleurer et faire partir un professeur... le faire basculer... c'est plus qu'une simple blague." (p.130-131)

     

      "Jerry pensa qu'il comprenait le sens du geste de janza – Janza brûlait de l'envie d'agir, de toucher, de se battre. Et il devenait impatient. Mais il ne voulait pas commencer le premier. Il voulait pousser Jerry à le faire, c'est ainsi qu'agissaient ceux qui brimaient les autres, pour se sentir innocents après le délit. C'est lui qui a commencé, clamaient-ils." (p.173)

       

    (La guerre des chocolats de Robert CORMIER)

      

    Partager via GmailGoogle Bookmarks Blogmarks

    votre commentaire
  • "Il était question d'un congrès en province et d'un dîner très arrosé. Ils s'étaient attardés dehors avec quelques collègues, tous très éméchés, lorsqu'une jeune femme qui avait participé au colloque, mais qu'ils ne connaissaient pas, était passée devant eux. L'un d'eux l'avait interpellée, pour rigoler.

     "...tu peux me croire qu'elle serrait les fesses !" a-t-il lancé au moment où je revenais pleinement à la conversation.

     Tout le monde a ri. Les femmes aussi. Je suis toujours étonnée que les femmes rient à certaines blagues.

     - Ah bon, l'ai-je interrompu, elle serrait les fesses ? Cela te surprend ?

     Je ne lui ai pas laissé le temps de répondre.

     - Tu veux que je t'explique pourquoi ?

     Il regardait les autres l'air de dire : voilà, de quel genre de femme le destin m'a affublé.

     - Parce que vous étiez quatre mecs bourrés dans une zone d'activité déserte, pas loin d'un hôtel Ibis ou Campanile quasiment vide. Eh bien oui, William, cela fait sans doute partie des différences essentielles entre les hommes et les femmes, fondamentales, même : les femmes ont de très bonnes raisons de serrer les fesses.

     (...)

    Cela te surprend ?

     

    Je me suis adressé à William mais aussi aux deux autres hommes de l'assemblée.

     

    - Est-ce que vous serrez les fesses lorsque vous croisez un groupe de jeunes filles manifestement ivres en pleine nuit ?

     

    Le silence épaississait à vue d'oeil.

     

    - Eh bien non. Parce que jamais aucune femme, même ivre morte, n'a posé sa main sur votre sexe ou vos fesses, ni accompagné votre passage d'une remarque à caractère sexuel. Parce qu'il est assez rare qu'une femme se jette sur un homme dans la rue, sous un pont, ou dans une chambre pour le pénétrer ou lui enfoncer je ne sais quoi dans l'anus. Voilà pourquoi. Alors sachez que oui, n'importe quelle femme normalement constituée serre les fesses lorsqu'elle passe devant un groupe de quatre types à trois heures du matin. Non seulement elle serre les fesses mais elle évite le contact visuel, et toute attitude qui pourrait suggérer la peur, le défi ou l'invitation. Elle regarde devant elle, prend garde à ne pas presser le pas, et recommence à respirer quand enfin elle se retrouve seule dans l'ascenseur." (p.144-146)

       

    (Les loyautés de Delphine de VIGAN)

      

    Partager via GmailGoogle Bookmarks Blogmarks

    votre commentaire
  •  

    "Comme beaucoup de Français, je ne sais pas grand-chose des Roms.

     

    Quelle est leur origine géographique ? Pourquoi fuient-ils leur pays ? Pourquoi s'installent-ils en France, là où ils sont si mal reçus ?

     

    Manon Fillonneau, déléguée générale du Collectif National des droits de l'Homme / Romeurope :

    "Les Roms représentent 8 à 10% de la population roumaine et 7% de la population hongroise. Mais ils sont aussi présents en Bulgarie, en République Tchèque, en Turquie, en Serbie, au Kosovo...  En fait, le terme "rom" signifie "homme" en langue romani.

     

    Entre 15 000 et 20 000 personnes originaires des pays de l'Est vivent en bidonville en France : environ 90% sont des Roumains. Mais il s'agit aussi bien de Roms roumains que de Roumains précaires." (p.63)

     

     

     

    "Elena n'a pas eu affaire au racisme en France. Pourtant, concernant les Roms,  les préjugés ont la vie dure. Cela ne date pas d'hier : depuis longtemps, dans l'imaginaire collectif, les Roms traînent une image de voleurs, de "faiseurs d'histoires".

     

    On les croit nomades alors que l'habitat en bidonville n'est pas un choix mais une nécessité... (...)

     

    On imagine qu'ils ont "déferlé" sur l'Europe de l'Ouest et notamment la France. Or, dans les faits, ils représenteraient en France 1 à 2% des Roms de Roumanie. Et depuis 2005, ce chiffre est relativement stable. Il n'y a donc pas d'"invasion" rom.

     

    On imagine aussi que les Roms exploitent leurs enfants en faisant la mendicité avec eux. Mais c'est parce qu'ils n'ont pas le choix. Laisser un enfant dans un bidonville toute une journée ? C'est impossible pour les parents et ce serait très dangereux !" (p.76-77)

     

     

     

    "Les politiques, de droite comme de gauche, confondent volontiers Roms et "gens du voyage" et les accablent de tous les maux. Ils constituent une parfaite excuse pour mener des politiques sécuritaires plus dures.

     

    Les Gens du Voyage que l'on appelle parfois Gitans, Manouches ou Forains, vivent en France depuis très longtemps. Bien que citoyens français depuis des générations, jusqu'à peu, ils n'avaient pas droit à une carte d'identité." (p.78)

     

     

     

    ("Mes voisins roms" par Joséphine LEBARD et Julien REVENU in TOPO n°12)

     

    Partager via GmailGoogle Bookmarks Blogmarks

    votre commentaire
  • «La danse quotidienne des normes et des stéréotypes nous rappelle à quel point le corps est politique. Tout comme nos ébats amoureux. Le couple hétérosexuel monogame, blanc, beau et à l’éternel sourire de dentifrice, reste dans l’inconscient collectif le schéma souverain de l’état amoureux. Où sont les autres réalités ? Où est la mienne ?

      

     Courtes-pattes, grassouillets, colorés, androgynes, trans, scarifiés, malades, handicapés, vieux, poilus, hors-critère-esthétique...  Pédés, gouines, travelos, freaks, inconstants, cœur d'artichaut, multi-amoureux et aventuriers, nous écrivons nos propres poèmes, vibrons à travers nos propres romances. Nous ne sommes pas une minorité, nous sommes les alternatives. Car il y a autant de relations amoureuses qu'il y a d'imaginaires.

     

    Ce recueil est un échantillonnage de notre palette. Si mon crayon n'arrive pas à retranscrire le goût des larmes, du silence férocement bruyant d'un coeur qui éclate, ni de tout l'épiderme qui se soulève dans une bouffée d'extase, que ce livre soit au moins un hommage rendu aux êtres amoureux qui vont à contre-courant de ce qui est attendu d'eux, parfois au péril de leur vie. »

       

    (Préface de Julie MAROH à son livre Corps sonores)

     

    Partager via GmailGoogle Bookmarks Blogmarks

    votre commentaire