• planche extraite du Larousse 3 volumes en couleurs (1966)

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  • planche extraite du Nouveau Larousse Universel en 2 volumes (1948)

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  • C'est malsain ?

     

    « Douze ans & en sixième & maintenant je portais des lunettes & j'étais dégingandé, maigre, des poils sous les bras, à l'entrejambe & leurs yeux glissaient sur moi, même les professeurs & en classe de gym je refusais d'aller à la douche refusais de me promener nu parmi eux & leurs bites luisantes & en train de se gratter le torse, le ventre, certains si musclés, si beaux & riant comme des singes sans deviner sauf s'ils me voyaient & mes yeux toujours en mouvement bondissant & filant parmi eux comme des vairons s'ils me voyaient ils savaient & leur visage se durcissait de dégoût PÉDÉ PÉDÉ QUENTIN EST UN PÉDÉ & ce jour où Papa a foncé au premier où je faisais mes devoirs dans ma chambre & m'a tiré par le bras & traîné en bas & dans le garage & montré les revues Body Builder & la poupée Ken nue de la cour de récréation rapportée cachée derrière des piles de vieux journaux & il l'avait trouvée le visage marbré & furieux & à ce moment-là Papa portait une barbiche comme le docteur M... K. & elle aussi était blanche d'indignation. Serrant les revues à deux mains comme s'il tordait le cou d'un poulet pour s'épargner la vue des couvertures & des dessins que quelqu'un avait faits dessus au feutre rouge fluorescent. & aussi l'intérieur avec d'autres dessins du même genre sur les doubles pages centrales de corps mâles musclés & ce jeune type ressemblant à Barry quand il aurait été plus vieux & avec pas mal de kilos en plus & la banane rose vif toute droite entre ses cuisses & des parties de certaines photos découpées aux ciseaux. « C'est malsain Quentin » la bouche de Papa remuait, haletait, « c'est dégoûtant je ne veux plus jamais jamais revoir des choses comme ça de ma vie. Nous n'en parlerons pas à ta mère » sur le point d'en dire davantage mais la voix lui a manqué. » (p .41-42)

     

    (Zombi de Joyce Carol OATES)

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  • planche extraite du Nouveau Larousse Universel en 2 volumes (1948)

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    « Et soudain je compris comment Tulipe pouvait raconter mensonge sur mensonge et ne jamais se rendre compte que les autres trouvaient ses mensonges totalement absurdes. Elle était persuadée que c'était le monde qui ne tournait pas rond. Si le monde tournait rond, si les choses s'étaient passées comme il fallait, elle n'aurait jamais eu besoin de mentir, ni de voler, ni d'être méchante.

     

    Si le monde avait tourné rond, elle aurait été une fille bien, une fille gentille - celle qu'elle était au fond d'elle-même avant que les choses ne tournent mal et ne la déforment. » (p.123)

     

    Si le monde avait tourné rond

     

     

     

    « Tulipe me manquait terriblement et je les détestais tous. Pourquoi étaient-ils persuadés que c'était à moi de faire venir Tulipe, toujours à moi ? Ils savaient tous où la trouver. ils savaient tous qu'elle devait être assise avec ses affreux vêtements de tous les jours, en train d'écouter sa mère fredonner et son père la tarabuster, tandis qu'elle examinait le cadeau hideux et minable que sa mère s'était procuré en grappillant sur le peu d'argent qui restait une fois que M. Pierce avait acheté ses bouteilles. Eux étaient tous réunis autour du piano, sur leur trente et un, l'air altier et l'estomac plus que plein. Qu'est-ce qui empêchait l'un d'eux de remplir un panier et d'aller le lui porter ? Ou même de la ramener ? "Allez, viens Tulipe. Nous savons tous que tu n'es plus très copine avec Nathalie. Mais nous, nous t'aimons encore. Viens avec nous."

     

    Mais non. C'était à moi de le faire. c'était à moi de m'occuper de Tulipe (mais prends garde qu'elle ne te fasse pas porter le chapeau). Sois gentille avec elle (mais fais attention de ne pas tomber sous son emprise). Va jouer avec la sorcière (mais ne te laisse pas ensorceler). » (p.150-151)

     

     

     

    « - Non, dit-il au bout d'un moment, d'une voix calme. Ce n'était pas assez grave. Et j'ai bien peur que la vie ne soit un peu comme ça, Nathalie. Il faut que les choses soient bien pires que graves pour être considérées comme intolérables. Et jusqu'à ce qu'elles en arrivent là, les gens sont seuls.

     

    J'étais écœurée. Complètement écœurée. » (p.178)

     

     

     

    « A la limite, Tulipe était plus courageuse et plus gentille. Et puis les gens ne sont pas des forteresses. On peut aller voir à l'intérieur d'eux, si on veut.

     

    Mais personne ne l'a fait. Personne n'a tendu la main à Tulipe. Personne n'a essayé d'établir un contact avec elle. Je les entends chuchoter et ça me rend malade.

     

    (...)

     

    Je ne pourrai plus jamais penser à Tulipe sans être triste pour elle.

     

    Et sans me sentir coupable.

     

    Oui, coupable. (p.196)

     

     

     

    (Mon amitié avec Tulipe d'Anne FINE)

     

     

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  • planche extraite du Nouveau Larousse Universel en 2 volumes (1948)

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    « - Tu sais depuis combien de temps je suis amoureuse de toi? demande-t-elle en me rendant les avirons.

     

    J'évite de risquer une réponse qui pourrait me faire passer pour inattentif ou prétentieux.

     

    - Cinq minutes. Quand, après m'avoir embarquée, tu as loué un troisième ciré et que tu es allé abriter mon fauteuil.

     

    Mes yeux se posent sur la tache jaune entre les pins au loin. Mon souci était d'éviter qu'elle ne se trempe les fesses au retour, mais ce qui semble l'avoir touchée davantage, c'est ma façon de traiter son compagnon de route comme une part d'elle-même. »

     

      

    Pas résumable à un fauteuil roulant

      

    « En face d'elle, un garçon de quinze ans, recroquevillé dans un fauteuil électrique, le corps sanglé à son dossier, lisait un roman.

     

    Concentré, absorbé, isolé des bruits de flipper et de Nintendo. Toutes les minutes et demie, son visage se contractait et c'était la torture : il devait s'y reprendre à dix fois pour commander son geste, rassembler ses forces, coordonner ses mouvements et finalement réussir, au prix d'un effort de volonté intense, l'opération si simple de tourner la page.

     

    -Et tu sais ce qu'il y avait alors, dans ses yeux ? Du plaisir. Du plaisir devant ces mots étalés face à lui, gagnés à la sueur de son front ; du plaisir plus fort que la peine et la contrainte qui l'attendaient au bas de la page suivante. C'est ce petit corps tordu au dessus d'un roman qui m'a appris qu'on pouvait toujours être libre. »

     

     

     

    « Si je vous avais dit qu'elle a ce handicap, vous l'auriez traitée comme telle et vous seriez passés l'un à côté de l'autre, parce qu'elle n'a pas changé, Thomas : elle n'est pas résumable à ce fauteuil. »

     

     

     

    (La Demi-pensionnaire de Didier van CAUWELAERT)

     

     

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  • planche extraite du Larousse 3 volumes en couleurs (1966)

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    « Trente-cinq degrés de température, huit de tension, aménorrhée, dérèglement du système pileux, escarres, ralentissement du pouls et de la pression sanguine, nous avons là tous les signes de la dénutrition. » (p.17)

     

     

     

    « Anorexique. Ça commence comme anorak, mais ça finit en hic. Dix pour cent en meurent à ce qu'il paraît. Par inadvertance peut-être. Sans s'en rendre compte. De solitude, sûrement. » (p.21)

     

     

     

    « Il dit la priorité c'est assurer la renutrition. Dans l'altération de l'état nutritionnel, on observe un certain nombre de phénomènes qui renforcent l'anorexie. Dénutri, le corps éprouve de moins en moins la sensation de faim. A l'intérieur, les muscles ne font plus leur boulot. le cerveau n'est plus alimenté. Il faut restaurer les fonctions. Il dit qu'elle doit commencer par grossir, avant tout, pour être capable de sentir à quel point elle est maigre. Elle doit manger pour se rendre compte qu'elle est capable de vaincre cette angoisse et qu'elle peut vivre autrement que dans le manque. » (p.34)

     

     

     

    « La sonde impose l'impossible, l'inacceptable, des calories par centaines, insidieuses, une liqueur saturée distillée goutte à goutte dans son ventre meurtri. mais la sonde n'est associée à aucun geste, aucun goût, aucun plaisir. la sonde ne crée pas de dépendance. Elle fait le sale boulot, presque en silence. » (p.35)

     

     

     

    « Elle cherche ça avant tout : garder le contrôle. Le risque de dépendance vient de ce qu'elle absorbe par la bouche. Elle avale chaque morceau en se disant qu'elle pourrait aussi bien ne pas le faire, que sa volonté est entière. Elle cherche la preuve de sa puissance intacte, j'arrête quand je veux, quand j'aurai repris des forces, juste de quoi survivre. Je repartirai dans les rues, je boufferai du trottoir à en perdre conscience. Elle mange pour sauver son corps, parce qu'elle ne veut pas mourir. Elle connaît maintenant de source scientifique le seuil en dessous duquel est le est en danger. Il suffit d'arriver jusque-là et de se maintenir à ce poids, un pied dans l'assiette, un pied dans la poubelle. Le souvenir de l'ivresse est encore si proche, cette ivresse du jeûne qui l'appelle parfois. » (p.36)

     

     

     

    « Elle avance, petit à petit. Pourtant, plus elle grossit, plus elle a peur de s'être laissé prendre au piège, de ne plus savoir se battre. Mais se battre contre quoi. » (p.54)

     

     

     

    « Entre anorexiques, on demande d’abord combien – combien de kilos, combien de calories, combien de temps – on ne demande pas pourquoi. Ce sont des choses qui viennent plus tard, avec le sel des larmes. » (p.58)

      

    Anorexique

     

     « Lanor, l'anorexique, le squelette titubant pendu à ses basques, qui lui chuchote encore son dégoût à l'oreille et se réjouit de ses errances. Lanor qui la brûle de l'intérieur. Elle écrit par petits bouts ce cri infini jusque là resté muet. Ce cri qu'ils n'ont pas su entendre. La vacuité de sa carcasse mise à nu, tout ça pour rien. » (p.100)

     

     

     

    « Sur une photo prise quelques jours avant son hospitalisation, elle découvre ce rictus qu'on ose maintenant lui décrire. La fixité du regard, son visage tiré, sa peau presque transparente. Une copine lui raconte un jour les stratagèmes dont elle usait lorsqu'elles avaient rendez-vous, pour voir Laure d'abord à son insu, cachée derrière un pilier ou un abri-bus, avoir le temps de s'habituer. Ils disent tu faisais tellement peur, tu avais l'air tellement déterminée, tellement lointaine? Ils disent on ne savait pas comment t'aborder, te parler, tu étais inaccessible. » (p.109)

     

     

     

    « Laure déballe à ses pieds, par petits paquets compacts, cette faim de vivre qui l'a rendue malade, elle le comprend maintenant, cet appétit démesuré qui la débordait, la débraillait, ce gouffre insatiable qui la rendait si vulnérable. Elle était comme une bouche énorme, avide, prête à tout engloutir, elle voulait vivre vite et fort, elle voulait qu'on l'aime à en mourir, elle voulait remplir cette plaie de l'enfance, cette béance en elle jamais comblée.

     

    Parce qu'il faisait d'elle une proie offerte au monde, elle avait muré ce désir dans un corps desséché, elle avait bâillonné ce désir fou de vivre, cette quête absurde, affamée, elle se privait pour contrôler en elle ce trop plein d'âme, elle vidait son corps de ce désir indécent qui la dévorait, qu'il fallait faire taire.  » (p.116)

     

     

     

    (Jours sans faim de Delphine de VIGAN)

     

     

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  • planche extraite du Nouveau Larousse Universel en 2 volumes (1948)

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