•  

     

    « - C'est plus grand que toi, c'est un système, et quand tu es pris dedans, tu ne t'en rends pas compte. Aucun policier en poste ne te dira jamais qu'il contrôle plus souvent les Noirs et les Maghrébins, mais ils le font. (...) ça dépasse ton individualité. (...) J'ai ma part de responsabilité, j'ai accepté d'accepter, si on peut dire.

     

    Mais la violence dans ce milieu-là, qu'elle soit physique ou autre, c'est pas une violence qui naît des personnes. C'est une violence qui existe par ce que la société la laisse exister. Ces individus, dans la police, existent parce que d'autres individus, encore plus nombreux, ont permis que ce genre de comportement soit quelque chose de tolérable. Alors que ça ne l'est pas, ne le sera jamais. » (p.270-271)

    C’est un système

     

    « La réponse de ma mère m'a énormément travaillée. Elle se disait que, puisqu'elle n'avait rencontré aucun problème lié à sa condition de femme, les autres n'en avaient pas non plus. C'était ... je n'avais même pas les mots. Combien de femmes pensaient comme elle ? Combien de femmes, et combien d'hommes ? Et si c'était ça, le véritable problème du sexisme ? Si c'était le fait qu'un certain nombre de gens s'imaginaient que c'était un cas résolu ? ça expliquerait beaucoup de choses. Ça expliquerait pourquoi Martin s'était vexé quand je lui avais fait remarqué ses propos déplacés, pourquoi le proviseur considérait que le harcèlement en ligne n'était pas de son ressort, pourquoi les garçons se permettaient encore d'agresser des filles. Si on considère qu'un problème est résolu juste parce que quelques députées sont élues et qu'une femme est à la tête de YouTube, et ne mérite plus qu'on s'en préoccupe, on se trompe lourdement. »

     

    « Aucune révolte n'a jamais été menée par quelqu'un qui s'est dit : "Bon, le monde dans lequel je vis me va plutôt, mais je vais quand même renverser le système, juste pour voir." Il m'a fallu du temps pour accepter ma colère, pour ne plus la refouler derrière des arguments modérés, pour comprendre que si les femmes, et tous ceux et celles mis à mal dans cette société, criaient, c'était justement car ils et elles en avaient besoin, après tout ce temps à se taire et encaisser.

     

    La colère ne décrédibilise pas un mouvement, elle le rend légitime. S'il y a une colère, c'est bien qu'il y a un problème. »

     

    (Rose rage d'Iliana CANTIN)

     

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  •   « Tu crois que c’est quoi le sexisme ? Tu crois que ce sont des mecs qui se lèvent tous les jours en se disant qu’ils vont traiter les femmes comme des moins que rien ? Mais non ! C’est un système, c’est un truc invisible, mais c’est présent dans les gens, c’est dans leur corps, dans leur esprit. Le sexisme, c’est ce que tu viens de dire : quoi que les femmes veuillent faire, les hommes le feront sûrement mieux. » (p.58)

     

    « Visiblement, dans ce monde, demander un peu plus de justice pour les femmes, c'est empiéter sur les libertés des hommes. »

     

    Une moitié de la population

    « Vous saviez que le 24 octobre 1975, en Islande, les femmes ont fait grève ? Pendant une journée, elles ne sont pas allées au travail et n'ont rien fait à la maison. Elles ont tout laissé aux hommes. Résultat : les journaux n'ont pas pu être publiés, énormément d'entreprises n'ont pas pu fonctionner, les garderies et les écoles sont restées fermées, ce qui a obligé les hommes à prendre les enfants au travail avec eux. Et le pire dans tout ça ? Tous les magasins d'alimentation ont été à court de saucisses, et c'était le repas le plus populaire chez les enfants - et le plus simple à faire, si vous voulez mon avis. Grâce à cette action, non seulement elles ont réussi à éveiller une conscience féministe chez les plus jeunes, mais en plus, cinq ans plus tard, l'Islande élisait une femme au gouvernement. Voilà pourquoi je pense que votre action peut faire avancer les choses dans ce lycée. »

     

    « C’est ça aussi, le but du féminisme, c’est comprendre que toutes les femmes ont des expériences de vie différentes et qu’en tant que fille ou femme, on ne peut pas tout résoudre seule. » (p.128-129)

     

    « La solidarité féminine va plus loin que dépanner d'un tampon ou être présente quand une amie vit une rupture. Il s'agit, au quotidien, d'affirmer que le vécu de chaque femme est ponctué d'épreuves que certains hommes ne connaîtront jamais. Nous devons les croire, les écouter et les accompagner. »

     

    « C'est ça, être un homme impliqué dans la cause féministe. C'est être un soutien. Donner la parole aux femmes et les accompagner dans leurs combats sans leur voler la vedette. »

     

    (Rose rage d'Iliana CANTIN)

     

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  •   « Tu veux savoir ce qu'il y a ? J'ai mes règles et je voulais savoir si Manon avait des serviettes pour me dépanner. Mets-le dans ton reportage, parce que c'est un véritable problème que les filles connaissent. Beaucoup de règles, pas assez de protections! »

     

    « Sous les couches de papier journal, on a trouvé de la nourriture, du papier-toilette, du dentifrice et des brosses à dents, des magazines de mots fléchés et même une petite bouilloire avec quelques sachets de thé. Mes yeux se sont écarquillés quand j'ai vu ce qu'il y avait au fond.

     

    - Des serviettes et des tampons ! me suis-je écriée.

     

    Une joie étrange, mais justifiée. C'était un besoin de base comme un autre, mais on avait juste trop tendance à l'oublier, simplement parce que ça ne l'était que pour une moitié de la population.» (p.169)

     

    Beaucoup de règles et pas assez de protections…

    « Ce qui était épuisant pour une femme, ce n’était pas d’avoir ses règles – d’ailleurs, toutes les femmes n’avaient pas de règles, et toutes les personnes avec des règles n’étaient pas des femmes ! -, mais de devoir sans cesse prendre en compte des situations dont les hommes n’avaient parfois même pas idée. »

     

    (Rose rage d'Iliana CANTIN)

     

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  •  

     

    Le concept d’intersectionnalité

    « - Kimberley Crenshaw [...] est une féministe noire américaine. Elle a développé ce qu'on appelle le concept d'intersectionnalité. En gros, c'est le fait de dire que des rapports de pouvoir et de discrimination peuvent se croiser et être subis par une même personne, comme le racisme ou le sexisme. Donc, les femmes noires, ou maghrébines, bref, les femmes non blanches n'ont pas la même expérience de vie que les femmes blanches, qui ne subissent pas les mêmes discriminations. Aujourd'hui, ça inclut d'autres discriminations, l'orientation sexuelle, le fait d'être une personne transgenre, ça peut même inclure le niveau de tes revenus. Tout ça s'entremêle, et c'est important de le prendre en compte pour savoir quels sont les combats à mener. Tu suis ? Toutes les femmes n'ont pas les mêmes raisons d'être féministes, car toutes les femmes n'ont pas les mêmes problèmes. Si toi, tu es féministe parce que tu en as marre que des filles comme Ameline soient désignées comme coupables alors qu'elles ne le sont pas, et que moi, je suis féministe parce qu'en tant que femme noire j'en ai marre qu'on m'incite à m'orienter dans le paramédical alors que je veux devenir médecin, on est bien toutes les deux féministes ? » (p.128)

     

    (Rose rage d'Iliana CANTIN)

     

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  • "L'infraction [harcèlement moral selon l'article 222-32-2-2 du code pénal] est également constituée :


    a) Lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime par plusieurs personnes, de manière concertée ou à l'instigation de l'une d'elles, alors même que chacune de ces personnes n'a pas agi de façon répétée ;


    b) Lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime, successivement, par plusieurs personnes qui, même en l'absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition."

    La répétition des propos et comportements harceleurs


    La nouveauté de cette loi, c'est que la répétition ne concerne plus l'agresseur, mais la victime. Si votre victime est harcelée par des dizaines de personnes, celles-ci sont condamnables, y compris si elles n'ont envoyé qu'un seul message, dès lors que : soit elles se sont concertées pour harceler la victime, soit elles savaient, individuellement, que la victime recevait des messages similaires d'autres individus. Typiquement, pour montrer cela, sur Twitter, par exemple, l'utilisation d'une même "hashtag" permet de démontrer que l'auteur d'un message connaissait l'existence des autres messages... (p.113)

     

    (Lola doit mourir de Bruce BENAMRAN)

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  • "- Avec son téléphone, on verrait les messages qu'elle a reçus sur WhatsApp, ou Telegram, ou Snapchat, mais on ne verrait rien de tout ce qui s'est passé autour, des échanges entre tous les gens qui se sont passé le mot et qui ont discuté de leur côté." (p.24)  

    "C'est une histoire vieille comme le monde. L'Inquisition, les croisades, n'importe quelle guerre sainte, c'est pareil : les gens se cachent derrière des idéaux ou des valeurs morales qui leur permettent de bien dormir alors qu'au fond, ce qu'ils veulent, c'est faire souffrir les gens qu'ils n'aiment pas, puis aller se coucher la conscience tranquille, persuadés d'avoir œuvré pour le bien de l'humanité." (p.86)

    La face invisible du harcèlement

    "...là, il ne s'agit pas de justice sociale, il s'agit d'abrutis qui jouent avec le sentiment d'impunité dû à leur anonymat." (p.86)  

    "L'homme invisible, lorsqu'il sait qu'on ne peut ni l'identifier ni l'attraper, qu'est-ce qui l'empêche d'aller violer sa voisine ? Les réseaux sociaux, aujourd'hui, pour certains, c'est la même chose. Dès lors que tu es convaincu qu'on ne peut ni t'identifier ni te retrouver, qu'est-ce que tu feras que tu ne ferais pas normalement ?" (p.88)

    "C'était ça, l'effet Streisand. Ouvrir sa gueule sur Internet, c'était amplifier ce qu'on voulait faire disparaître." (p.171)

     

    (Lola doit mourir de Bruce BENAMRAN)

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  •   « - En parlant de corps, a soufflé Manon, moi je suis là parce que les gens n'aiment pas mon corps et ne veulent pas que je l'aime.

     - Toi, tu l'aimes ? a demandé Inès.

     - Moi, je l'adore. En plus, tu vois, on pourrait se dire que ce n'est pas une question féministe, que c'est juste que les gens ne respectent pas les personnes grosses, mais même pas. Mon cousin, il est encore plus gros que moi, et aux repas de famille, quand il reprend deux fois du dessert, on rigole, on dit : "Quel bon vivant, lui !". Mais moi, on me met en garde, on me dit gentiment que ce n'est pas comme ça que je vais trouver quelqu'un. »

    On ne TRAITE pas les gens de…

     

    « - Eh, c'est bon. Manon est bien dans sa peau, je te le promets. Et 'grosse', c'est juste un mot, ok ? Pas une insulte, on ne TRAITE pas les gens de gros. Tu ne me TRAITERAIS jamais de noire, hein ? Tu dirais juste que Clara est noire. Parce que ce n'est pas une insulte, c'est un adjectif. Là, c'est pareil. Si Manon dit qu'elle est grosse, c'est parce qu'elle est objectivement grosse, ça ne veut rien dire d'autre. »

     

    (Rose rage d'Iliana CANTIN)

     

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  •  « Je n'aurai plus jamais faim, me suis-je dit. Il était sept heures du soir et j'avais faim.

     (…)

     J'avais treize ans, et fini de grandir. On mange pour grandir. je ne grandirai plus, m'étais-je dit. Je ne mangerai plus que le minimum. Ce qu'il faut pour durer. Cela faisait comme un champ d'exploration immense, la découverte d'un territoire sauvage et secret. » (p.9) 

     

     « Je ne dis pas à Joëlle mes raisons. Je ne ferai pas de psychanalyse, parce que j'ai peur de ce qu'il y a dans ma tête, comme les autres filles de ma classe. Et aussi, parce que j'y tiens, c'est mon capital le plus précieux, comme dit mon grand-oncle, qui est communiste. » (p.14)

     

     « C'était une nouvelle certitude (...) : je risquais de devenir folle, et le pire, me disais-je avec effroi, c'était la peur non pas principalement d'être folle, mais d'être folle et par conséquent de ne pas me rendre compte que j'étais folle. Et c'était une inquiétude assez légitime, car j'étais en train de devenir folle, de ne pas m'en rendre compte du tout. » (p.20)

     

      « D'où vient tout ce mal dont on l'accuse ? Elle sait juste qu'elle n'a la paix dans son coeur qu'à ce prix : que le bébé soit gavée, et qu'elle, Nouk, ressente, dans son ventre, les crampes vertigineuses de la faim. » (p.67)

     

     « Nouk est si mal guérie, elle ne pense qu'à la manière de faire vite repartir toute cette mauvaise graisse qu'on l'a obligée à accepter, ce déguisement de survie. » (p.95)

     

      « Ils m'ont dit deux choses dont je me souviens. La première, c'est que, contrairement à ce que je pense, ce n'est pas très important, la beauté.

     

    Que j'avais tort de penser trop à cela, être belle, ou être laide. Ils ont dit que j'étais bien assez belle pour ne pas me torturer avec ce faux problème. Je n'en ai pas cru un mot, mais certaines phrases s'impriment pour toujours et celle-ci en fait partie. C'était comme s'ils me disaient de moins me fatiguer. » (p.96)

      

    (Petite de Geneviève BRISAC)

     

     

     

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  •  « Vous le savez, reprit Chloé, c’est une rebeu. J’ai rien contre, seulement elle n’est pas comme nous.

     - Pourquoi ? Releva Sylvie avec vivacité. Qu’est-ce que tu vois de différent, toi ?

     - D’accord. Mais t’as pas entendu à la télé ce qui se passe en Algérie ? Ça craint. Et puis l’an passé, il y avait une fille en troisième D ; elle est partie pendant les vacances de Pâques et n’est jamais revenue, on l’a mariée de force chez elle.

     (…)

     - ça veut rien dire ! Tu crois que chez nous les filles font ce qu’elles veulent ,

     - On ne nous marie pas de force quand même !

     - Non, c’est devenu rare. Mais on nous oblige à d’autres choses dont on n’a pas envie.

     (…) Quand tu vis dans la rue ou que tu fais toute ta vie un métier pourri, c’est pareil que d’être mariée de force. » (p.9-10)

      

    « Ils sortaient du hall ; dans la rue se tenaient trois des rares Maghrébins du collège, des garçons qui étaient toujours ensemble. C’est alors que Rachid, élève de la classe de Manon, se tourna pour lui faire un sourire que Manon lui rendit.

     Thibaut empoigna soudain Manon par le bras :

     - Me refais plus jamais ça ! Gronda-t-il d’une voix dure.

     Elle se dégagea, étonnée et choquée.

     - Te faire quoi ? Demanda-t-elle.

     - Joue pas l’innocente. Ces gars-là, tu les ignores, ni bonjour, ni bonsoir, compris ?

     - T’es ouf ! Qu’est-ce qui t’arrive ?

     - Il ne m’arrive rien. Seulement, les Arabes, je ne peux pas les sentir. Ils n’ont rien à faire chez nous, et je ne veux surtout pas qu’ils s’approchent de toi.

     - De quoi tu te mêles ! J’ai juste dit bonjour.

     - Ni bonjour, ni bonsoir, je le répète. Ce sont des musulmans ; des filles, il leur en faut trois ou quatre à chacun, ne l’oublie pas.

     - Facho ! Jeta Sylvie, outrée.

     - Occupe-toi de tes affaires !

     Manon ne savait que dire, heurtée par l’intervention de son copain et par sa véhémence. Elle n’avait rien contre les Arabes, et rien contre Rachid qui se comportait toujours bien avec elle. Elle aimait moins Ahmed, l’autre Maghrébin de sa classe, mais pas du tout en raison de ses origines. » (p.12-14)

     

    Les rebeus

     

    « Le conseiller d’éducation, quant à lui, se rendit rapidement compte du caractère raciste de l’affaire, ce qui inquiéta le principal.

     Celui-ci venait d’un collège d’une grande ville de banlieue, où les problèmes de racisme faisaient partie de la vie de tous les jours, en raison d’une forte proportion, dans un même établissement, d’élèves d’origine étrangère, issus de familles aux conditions de vie souvent difficiles. Problèmes en tous genres, entre Français d’origine (ou du moins de longue date), Maghrébins, Noirs, Turcs, Kurdes, y compris entre élèves arabes et professeurs juifs de confession. Parfois, les Français se trouvaient en minorité ; ils subissaient alors, eux aussi, les pratiques racistes du groupe majoritaire de leur classe. » (p.42-43)

      

    « - D’accord, déclara M. Dévolu, il n’existe aucune preuve de la culpabilité de qui que ce soit. Mais soyons logiques, réfléchissons à qui profite le crime, entre guillemets, fit-il en accompagnant ses paroles d’un geste. Et il conclut : Je n’en dirai pas plus.

     Il n’en dit pas plus, non, mais chacun pensa aux élèves maghrébins. Qui d’autre aurait commis cet acte de vandalisme ? Même Sylvie ne put rejeter l’insinuation du conseiller d’éducation. Seul, le professeur de mathématiques, toujours lui, rappela qu’on manquait d’éléments tangibles, palpables, indispensables pour condamner :

     - Sous-entendre, suggérer, prétendre sournoisement… Je ne suis pas d’accord avec cette façon de faire... » (p.68-69)

      

    «- Le principal voulait une punition exemplaire. Ils vont afficher la décision, pour bien montrer qu’aucune violence ne sera plus tolérée, qu’il faut filer droit, et le reste… Ils ont surtout insisté sur les circonstances aggravantes pour les rebeus : la mob, le nez cassé, le guet-apens à trois dans le couloir. (…)

     Cette fois, il s’agissait de Thibaut, un Thibaut triomphant :

     - (…) Je te l’avais dit que je m’en sortirai : juste une petite semaine de vacances et on n’en parle plus ! Quand aux rebeus, ils sont virés pour de bon ! On a gagné ! On ne verra plus leurs gueules, on reste entre Français au collège ! Mon père est si content qu’il m’a promis une mob neuve à la rentrée ! Depuis le temps que je la voulais…

     Une mob neuve ! Trois mots qui firent tilt, sans que Manon ne sache pourquoi. Elle s’entendit demander :

     - Au fond, ça t’arrange d’avoir eu tes pneus crevés ?

     La voix de Thibaut baissa d’un ton, mais resta aussi excitée, enthousiaste :

     - Ouais, ça fait d’une pierre deux coups : ma mob était pourrie, j’en aurai une autre, et les rebeus sont passés aux chiottes !

     - Dis donc, t’aurais pas crevé tes pneus toi-même ?

     - Qu’est-ce que ça peut faire ? Y a que le résultat qui compte ! » (p.73-74)

      

    (Un jour, au collège de Bertrand SOLET)

     

     

     

     

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  •  « Oui, il faut que les enfants victimes d’abus sexuels osent parler. Il faut qu’ils sachent qu’ils n’ont rien fait de mal et qu’ils doivent s’exprimer pour que cessent ces violences intolérables qui brisent des vies.

     

    Mais si la vérité doit éclater, le mensonge n’en continue pas moins d’exister…

     A la mémoire du prof qui n’a pas pu lutter contre « tant de dérisoire » » (Avertissement liminaire de l’auteur)

      

    « - Devine un peu ce qu’il a trouvé cette fois-ci ?

     (…)

     Pour se venger de la punition que je lui ai donnée hier, il a raconté à sa mère que je l’avais tripoté et elle n’a rien trouvé de mieux que de venir se plaindre au principal.

     (…)

     Tu te rends compte ? C’est incroyable ce qu’un gosse de douze ans peut inventer pour se venger d’un prof. » (p.16)

      

    « - Et puis certains troisièmes prétendent que, quand ils l’avaient comme prof, il poussait les fesses de ceux qui n’arrivaient pas à faire les roulades… des trucs comme ça.

     

    - C’est idiot. C’est comme si tu reprochais à ton médecin de te toucher le ventre.

     

    - Il y en a qui disent que ça dure depuis des années et que Steve Plicard n’a pas été le premier à se faire coincer dans les vestiaires, seul à seul, mais que les autres ont eu peur de parler.

     

    Tristan reste K.-O.

     

    - Remarque, ajoute Paul, c’est toujours des histoires qui ne leur sont pas arrivées à eux personnellement, mais à d’autres qui les leur ont racontées. Mais tellement d’histoires ont circulé... » (p.42-43)

     

     « Tristan avance tout en essayant de se rassurer :

     

    « Je suis sûr qu’ils ne mentiront pas. Ils n’oseront pas profiter de l’interrogatoire pour se venger, simplement parce qu’ils n’aiment pas l’école. Les filles que j’ai surprises dans l’escalier, elles plaisantaient. Elles avaient envie de rire, mais, devant la police, elles diront la vérité parce qu’au fond elles ne sont pas méchantes… »

     (…)

     Il se rassure comme il peut, mais il sent bien que le nombre n’a guère d’importance. Si un autre élève, un seul, prétend que son père a eu des gestes déplacés envers lui, les policiers croiront aux accusations de Steve Plicard. » (p.53-54)

     

     

     « - Qu’est-ce que tu as répondu ?

     

    - Ben, la vérité. La vérité c’est que ton père est un prof qu’on aime bien et qu’il ne laisse pas les emmerdeurs comme Steve Plicard faire la loi. C’est la vérité, non ? Et puis, je ne dois pas être le seul à avoir parlé comme ça.

     Ces paroles réconfortent un peu Tristan. Un sourire triste se dessine sur ses lèvres. Il espère que l’enquête est destinée à rechercher la vérité, pas à collecter des éléments qui risquent d’accabler son père innocent et de donner raison à Steve. Non, les enquêteurs seront neutres, ils ne se laisseront pas influencer ni par les uns ni par les autres ! » (p.63-64)

     

    Le pouvoir de la parole

     

    « - Steve, si tu m’expliquais tes paroles, insiste la commissaire.

     

    Steve change soudain de ton et sa voix chancelle. Il se trouble et dit, avec l’accent d’un gamin qui vient d’être pris en flagrant délit de mensonge par la maîtresse :

     

    - C’est d’sa faute aussi, il avait qu’à pas me punir tout le temps. Pour un oui, pour un non, il m’engueulait. C’est vrai ça, à la fin, on en a marre. Y’a pas que moi qui le dis.

     

    Steve bredouille. Il lève les yeux vers la commissaire. Elle ne répond rien. Elle l’observe. Le silence se prolonge. Steve ne semble pas supporter ce silence. Au bout de quelques dizaines de secondes, il se prend la tête dans les mains et se met à pleurer. » (p.86-87)

     

      « D’une voix remplie de rancoeur, la mère de Tristan ajoute :

     - Mme Plicard aussi a une part de responsabilité, comme les autres parents, l’inspecteur d’académie, les journaux…

     

    La commissaire la coupe d’une voix posée :

     - La pédophilie est un sujet grave, madame Gastégui. Alors tout le monde réagit avec passion. Certains ont peur, d’autres sont inquiets, d’autres encore craignent qu’il leur soit reproché d’avoir été trop timorés ou trop lents. Personne ne veut prendre le risque de couvrir des pédophiles et c’est bien compréhensible. » (p.89)

     

     

    (Bruits de couloir de Roger JUDENNE)

     

     

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