• Le no Adam's land

     « Pourtant tu étais si mignon quand tu es né, j'étais si contente quand je suis venue te voir à la maternité, avec ta petite tête toute rouge, on aurait dit la pomme de Blanche-Neige. Mais pourquoi tu n'as pas grandi comme les autres ? Pourquoi tu ne nous as pas regardés quand on te parlait ? Pourquoi tu n'as pas pris ma main quand je te l'ai tendue ? » (p.5-6)

     

     « - Quand est-ce qu’on va arrêter de faire semblant de savoir comment l’aider ? Y a rien pour lui… C’est le no Adam’s land, personne ne cherche à le comprendre. Enfin presque personne. Parce que heureusement qu’il a son SESSAD… Eux au moins, ils sont aux petits soins, Adam adore les voir !

     - Son quoi ? A demandé Hugo.

     - Le SESSAD, ça veut dire service d’éducation spéciale et de soins à domicile, les éducatrices sont des spécialistes de l’autisme, elles sont super chouettes et quand elles viennent à la maison ou à l’école, tout de suite l’ambiance change…

     Si tu voyais le sourire de mon frère et puis celui de la mère… Et Adam, il s’y éclate, il a même commencé à s’y faire des copains… Eh oui, c’est pas parce qu’il a l’air débile qu’il est débile, il est intelligent mais c’est pas sa faute si son corps, ses sens ne font pas ce qu’il veut… Imagine-toi dix secondes dans une salle archi bruyante et plein de lumières partout qui font mal aux yeux, tu craquerais. Eh ben lui c’est tout le temps comme ça dans sa tête. Est-ce que tu crois que tu arriverais à avoir une conversation normale dans ces conditions ? Est-ce que tu crois que tu arriverais à savoir qui te parle ? Et à entendre clairement ce qu’on te dit ?

     - T’énerve pas, je savais pas que c’était ça l’autisme. » (p.35-36)

     

    Le no Adam's land

     

    « Mais imaginez : déjà nous qui sommes tous les jours avec lui et qui faisons notre maximum pour le comprendre, on a du mal à le décoder, des fois ; eh ben, quand il sera grand, s’il n’est pas capable de s’exprimer correctement, personne n’aura la patience d’attendre qu’il ait fini sa phrase ou qu’il la répète, on va tout le temps se moquer de lui, ou passer à autre chose. Et ça, ça me fait vraiment peur…

     

    Parce qu’en fait, je ne le dis pas souvent mais je l’aime, Dark Vador, enfin, c’est Anakin que je cherche en lui, je voudrais tellement le trouver… C’est dur de voir que son frère n’est jamais vraiment là, qu’il est emprisonné dans une enveloppe, une sorte d’armure, parfois c’est comme un mur, vitré, parce qu’Adam me regarde mais il est tellement loin dans ses histoires, que je n’arrive pas à le rejoindre. Et puis, c’est bizarre mais certains jours, il est là, tu ne sais pas pourquoi, il est vraiment là et là pendant cinq minutes, tu peux vraiment lui parler et il te répond, là je sais que parle avec Anakin, pardon Adam, je sais que c’est lui mon vrai petit frère… Et puis la seconde d’après il est capturé, captif de ses dérèglements sensoriels, c’est comme s’il avait perdu les commandes de son cerveau ; je vois bien à ses yeux, il est loin, et je ne sais pas quand je pourrai le retrouver. Je sais qu’il est parti. Sans dire au revoir…

     

    C’est horrible, alors j’ai envie de casser la vitre, de m’élancer contre elle et la briser ; ce serait tellement simple. Tant pis si je me fais mal, je voudrais tellement retrouver mon frère… C’est une sensation tellement horrible, personne ne peut comprendre ça… C’est un peu comme s’il était mort, sans être mort, parce qu’il est bien vivant, il s’agite, il parle comme s’il s’adressait à des compagnons invisibles, dans un espace sans nom... » (p.42-43)

      

    « Alors là, je dois dire, je n’y avais jamais pensé que pour ce genre de personnes - « les handicapés dans la tête » - ce n’était pas facile. Je croyais qu’ils ne se rendaient pas compte. » (p.53)

      

    « Je ne sais pas pourquoi, mais dès qu’il rencontre quelqu’un de nouveau, il faut qu’il lui chipe un truc, comme si c’était sa façon de dire : « Salut, tu sais je peux pas parler, je peux pas te regarder dans les yeux mais on peut être en contact si tu me passes un truc à toi... »

     C’est comme un symbole, un trait d’union. Normalement, on se serre la main, eh bien lui, il préfère serrer un truc qui appartient à l’autre, qui n’est pas l’autre, mais qui est un peu lui quand même... » (p.58)

      

    (Mon frère, mon enfer, mon bel enfer de Christine DEROIN et Sandrine ANDREWS)

     

     

     

     

    « Le harcèlement scolaire empêche de vivreDe l'autre côté... »
    Partager via GmailGoogle Bookmarks Blogmarks

    Tags Tags : , ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :