•  

    « C'est en CM2 qu'ils ont commencé à m'embêter. Ils me « traitaient » du matin au soir. Au début, c'étaient des moqueries, sur mon nom de famille, Destin. Ils trouvaient toujours des mots qui allaient avec. Ils disaient : « C'est ton destin. » C'est ton destin d'être nul... ton destin d'être gros. A force de l'entendre, ça me faisait mal. T'es un con... T'es gros... J'étais assez enrobé. A onze ans, je devais faire dans les soixante-dix kilos. On m'embêtait surtout dans la piscine. Dès qu'ils me voyaient nager, ils balançaient des insultes sur mon compte. Évidemment, mes bourrelets, ils se voyaient bien dans l'eau. Je mangeais très mal cette année-là, parce que je grignotais entre les repas, beaucoup, j'avais toujours faim. Je pense que c'était une compensation. Plus les autres me traitaient de gros, plus je mangeais. La nourriture me réconfortait un peu, surtout le sucré comme les tartines de Nutella ou les biscuits. Ma mère me disait bien de faire attention. Mais moi, plus j'entendais les moqueries, plus j'entendais les insultes - « T'es gros... Gros porc... » - et plus je mangeais. Les garçons et les filles m'embêtaient comme ça tout le temps. C'était plus dur encore quand c'étaient les filles. Je ne disais rien, je ne répondais rien, je me taisais, j'avais peur d'eux. Le matin, je n'osais pas aller à l'école. Mes parents voyaient bien, quand j'avais des contrôles, que ça n'allait pas au niveau de mes notes. Je pense qu'ils savaient que je me faisais embêter. Une fois, ma mère a eu des doutes. Elle m'a suivi sur le chemin de l'école. Elle était loin derrière moi. A un moment, elle a vu des jeunes qui se mettaient à me jeter des cailloux. Ils étaient cachés derrière des voitures. Elle les a reconnus. Ils venaient d'une autre école. Je suis arrivé en classe en pleurant. Ma mère, elle, est allée voir le directeur de cette école et lui a désigné les fautifs :

     

    - Ces trois jeunes-là ont jeté des cailloux à mon fils.

     

    Le directeur les a tout de suite punis et ils n'ont pas recommencé. Mais les autres, ceux de mon école, eux, ont continué. Ils me bousculaient tout le temps. C'étaient des insultes sans arrêt. Un groupe de quatre garçons s'en prenait toujours à moi. Parmi eux, il y en avait un qui, au début, était plutôt gentil avec moi. Du moins, c'était ce que je pensais. On avait le même âge. Et puis un jour, il a commencé à me frapper, parce qu'il m'avait « traité » et que je lui avais répondu. Il s'est mis à me cogner. Et tous ses copains sont venus le rejoindre et ils m'ont tapé tous en même temps. Ils me frappaient sur la tête, dans les jambes, avec leurs mains, leurs pieds. Ils avaient dit du mal sur ma mère :

     

    - Ta mère, c'est une grosse comme toi !

     

    Je n'ai pas supporté ça. Sur moi, je pouvais encore supporter et me taire, mais pas sur elle. J'ai répondu :

     

    - Non, c'est pas vrai, ma mère est pas grosse. De toute façon, vous ne la connaissez pas !

     

    Et ils m'ont frappé juste parce que j'avais répondu. J'ai eu des bleus partout sur les jambes tellement j'avais reçu de coups de pied. Ils étaient quatre, ils s'amusaient. J'ai pleuré. Je suis même parti en courant voir mon professeur principal. Il m'a dit :

     

    - C'est pas grave, ils ne font que s'amuser avec toi.

    Personne ne voyait ce qui se passait

     

    Il ne les avait pas vus me frapper. Il pensait qu'on jouait ensemble. Il s'en fichait. Après, je les évitais, ces garçons. A la récré, je demandais si je pouvais rester dans la classe pour réviser. Je ne voulais pas sortir. J'essayais de les éviter pour tout. Au début, j'allais à la cantine de temps en temps, quand je ne pouvais pas retourner à midi chez moi, mais je n'aimais pas du tout. On me jetait de l'eau. Ils se foutaient de moi parce que je mangeais trop. Ils me mettaient des coups de pied sous la table, ils rigolaient et me tapaient parce que j'étais gros. Ils me regardaient manger en se moquant de moi. Ils me faisaient des grimaces. Du coup, je n'osais pas toucher à mon assiette. J'essayais d'aller à une autre table, mais la plupart du temps ils me rejoignaient. Il n'y avait pas de surveillants, seulement les cuisiniers et les professeurs. Personne ne voyait ce qui se passait parce qu'ils me donnaient des coups de pied sous la table. Je n'allais pas me plaindre au professeur, j'avais peur de lui, et de ce qu'il m'avait répondu le premier jour. « Ils s'amusent avec toi. » S'il préférait les croire, et ne pas voir, alors j'étais seul. Complètement seul. » (p.25-28)

     

     

     

    (Condamné à me tuer de Jonathan DESTIN)

     

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  • https://twitter.com/MatthieuJDH

     

    Un compte qui effectue une veille informationnelle quotidienne de l'actualité du harcèlement scolaire.

    L'interview de l'auteur de ce compte (en vidéo) explique les raisons pour lesquelles il veut qu'on en parle.

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    « Quelques jours avant, j'avais vu à la télévision un reportage sur un adolescent qui s'était immolé par le feu. Il était mort de ses brûlures. C'était en France, ça m'a frappé.

     

    Comme je savais qu'il en était bien mort, j'ai décidé de faire la même chose. Ça ne m'a pas fait peur, parce que je me disais qu'il fallait que ça s'arrête. Je ne pouvais plus vivre comme ça. La mort ne me faisait plus peur. Je me disais qu'avec toute la douleur que j'endurais depuis plus de deux ans, un feu qui dure quinze minutes, c'était ce qu'il me fallait.

     

    J'avais pensé aussi aux médicaments, et à beaucoup d'autres façons. J'avais songé à l'électricité. Me jeter d'un pont où passent le chemin de fer et les TGV. J'y avais bien réfléchi et j'étais même allé voir les possibilités près de la gare de Lille-Flandres où, justement, il y a un pont. Je me voyais sauter sur les lignes à haute tension. J'avais entendu dire qu'on était directement électrocuté. Mais il ne fallait pas rater les lignes. Et je n'étais pas très sportif.

     

    Une solution pour mourir

     

     

    Depuis un an au moins, je cherchais une solution pour mourir. Sur internet, je parcourais les sites sur le sujet qui expliquaient comment faire pour se suicider. Cela semblait facile et je les avais trouvés en tapant juste : « Comment se suicider. » Sur certaines vidéos de YouTube, on voyait des gens qui avaient sauté d'un pont et qui étaient morts électrocutés. J'avais en tête de choisir le moyen le plus efficace. Le plus sûr. Pour les médicaments, ils donnaient des noms et lesquels prendre. Ils parlaient aussi de la pendaison, ou de se couper les veines. J'ai abandonné l'idée des médicaments, trop compliquée : il fallait les obtenir d'un médecin, par ordonnance, et ensuite les acheter dans une pharmacie. Comme je n'étais pas malade et que je n'avais jamais vu de psychiatre, j'ai renoncé. J'ai été tenté un moment par l'idée de me pendre, mais j'avais peur que ce ne soit pas assez rapide. Ce jour-là, je voulais faire vite. Disparaître en fumée.

     

     

     

    J'ignorais ce que c'était la dépression. Je ne savais qu'une chose : ma vie était mauvaise, insupportable, et mourir était la solution pour arrêter. Me retrouver dans un autre monde, au calme, un monde que j'imaginais sans méchanceté, sans école. Je pensais tous les jours au suicide. Le soir, surtout, quand j'étais tout seul dans ma chambre. Et la journée aussi, quand je me faisais embêter à l'école, frapper, racketter, traiter de gros cochon, de bon à rien. Pour moi, la mort, c'était le calme, ne plus rien faire, ne plus se faire embêter... la liberté. Disparaître, ça ne me faisait rien. Sauf que je pensais beaucoup à ma famille. Je savais que j'allais leur faire de la peine : ils m'aimaient. Mais peut-être que c'était mieux de mourir, pour un fils aussi nul dans la vie. Je me disais que pour moi, ce serait la liberté. Plus d'école, plus d'insultes, plus de coups, et plus rien à apprendre. Avec tout ce qui se passait dans l'école, et à côté de l'école, le racket, l'humiliation, pour moi, mourir, ce n'était pas le pire. Mourir était la délivrance. Mourir était devenu ma seule et unique pensée. » (p.13-15)

     

     

     

    (Condamné à me tuer de Jonathan DESTIN)

     

     

     

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    «- C'est vrai ce que nous a dit Janis ? chuchota Tara. 

     

    - Que ton petit ami est gay ? précisa Lydia.

     

    - Ne faites pas attention à elle, répondit Lisa. Elle raconte n'importe quoi. Elle est rongée par la jalousie.

     

    - Mais il paraît que ton copain passe tout son temps avec un garçon, insista Lydia.

     

    - Oui, c'est vrai. Et figurez-vous que c'est notre meilleur ami. Il n'y a rien de mal à ça.

     

     

     

    (...)

    Ainsi vont les ragots

     

     

     

    Lisa les considéra d'un œil vide puis, se tournant vers la scène où se se déroulait le spectacle, fit comme si elles n'existaient pas. Janis avait raconté des horreurs sur son compte, et toute l'équipe d'encadrement devait déjà être au courant. Elle était devenue la fille au copain gay, et ses dénégations n'y changeraient rien.

     

    Ainsi vont les ragots. Ils salissent leurs victimes, mais leur source n'est jamais remise en question.

     

     

     

    (…)

     

     

     

    Janis et ses complices avaient imprimé dans son esprit une idée dérangeante qui n'aurait jamais dû y pénétrer. Et elle avait beau se répéter que leurs soupçons n'avaient aucun fondement, le doute, tel un poison, bousculait ses convictions... » (p.192-194)

     

     

     

    (Phobie douce de John Corey WHALEY)

     

     

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  •  

    « J'avais seize ans, je n'en pouvais plus. De l'école, des autres.

     

    Depuis des mois, ils me demandaient toujours plus d'argent. J'étais en troisième, au lycée Vertes-Feuilles, à Saint-André, près de Marquette. Ça ne s'arrêtait jamais. Ceux-là, en plus, ils étaient grands. Ils avaient au moins vingt ans. Je revenais du collège, il devait être midi et demi. Je n'étais plus très loin de chez moi, je venais de la place de la Mairie. Je ne les avais pas vus, je pense qu'ils étaient cachés derrière des voitures. Je les connaissais bien, si je les avais repérés avant, j'aurais pu m'enfuir. Mais là...

     

    J'ai toujours eu peur de les voir. Qu'ils me réclament encore des sous. Quand ils se sont lancés sur moi, je me suis retourné pour courir, mais un des trois garçons a bloqué le passage. C'est une petite rue étroite, en longueur, avec des grands murs de brique de chaque côté. Comme un tunnel. J'ai voulu faire marche arrière et courir en sens inverse, mais un deuxième s'est mis à l'autre bout. Un derrière moi, un devant moi, quand je les ai vus faire ça, je me suis dit : qu'est-ce qui se passe ? J'ai eu très peur. C'était trop tard. S'il y avait eu des passants, j'aurais été content, j'aurais demandé de l'aide. S'il y avait eu la police ou quoi, j'aurais crié. Mais il n'y avait personne.

     

    Racket sous la menace

     

    Ils ne m'ont pas cogné, ils m'ont juste mis l'arme sur la tête. Pour moi, c'était un vrai flingue, mais je n'ai pas trop fait gaffe. Quand ils me l'ont mis sur la tête, j'ai eu trop peur, j'ai pensé que c'était un vrai. Je ne sais toujours pas si c'était un vrai ou un faux. Je ne pouvais plus bouger, j'étais bloqué. Celui qui tenait l'arme, pour moi, c'était le chef. Il était un peu plus grand que moi. Ils avaient tous la même taille. Ils me fixaient.

     

    Ils m'ont dit : « Demain, tu ramènes cent euros ou on te fait la peau. »

     

    La veille, j'avais essayé de me défendre. J'avais pris un canif et j'en avais égratigné deux. C'était la première fois que je ne me laissais pas faire. Ils étaient partis en courant. Le soir, j'avais même pensé qu'ils avaient eu peur de moi et qu'ils ne reviendraient plus jamais me coincer. Mais là, j'ai vraiment cru qu'ils allaient me tuer. Les jours d'avant, ils m'avaient dit qu'ils avaient suivi mon père et qu'ils feraient du mal à ma famille. Je les croyais. J'aurais voulu aller à la police, mais j'avais peur qu'ils me le fassent payer très cher. Je pensais qu'ils allaient faire du mal à mes parents. Ils en étaient capables.

     

     

     

    Je tremblais. Ils m'ont dit que je devais ramener l'argent le lendemain. Ils m'ont dit de retourner au collège l'après-midi, de ne rien dire à personne, de revenir demain avec le fric, sinon ils allaient tuer ma famille. » (p.11-13)

     

     

     

    (Condamné à me tuer de Jonathan DESTIN)

     

     

     

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    « - Ben m'a demandé de vous lire une lettre... sa dernière lettre.

     

    Une onde de choc silencieuse traversa l'auditoire. Personne n'était au courant de cette lettre d'adieu.

     

    - C'est, c'est... une sorte de poème, bafouilla Coppola,... nous savons tous à quel point Ben aimait les rimes...

     

     

     

    Au moins dans une guerre

     

    Il y a un ennemi

     

    Pour justifier devant une mère

     

    La perte d'une vie

     

     

     

    Mort de moi

     

    Et par peur de l'autre

     

    Qui dans mon malheur se vautre

     

    Sans foi ni loi

     

     

     

    Si différent de mes semblables

     

    Innocents ou coupables

     

    Ils donnent la vie ou la prennent

     

    Moi je sors de l'arène

     

     

     

    Il paraît qu'au moment de trépasser

     

    Le mourant voit sa vie défiler

     

    Dans mon cas, cela avait autant d'intérêt

     

    Que regarder de l'herbe pousser

     

    Voici toutefois un ou deux extraits

     

    Qui ne manqueront pas de vous intéresser

     

    Lettre d'adieu

     

     

     

    A ce moment, Coppola regarda en l'air, non sans une certaine hésitation. Quelqu'un appuya sur un vidéoprojecteur. Un faisceau lumineux pourfendit la salle comme le canon laser dans Lethal Assault et s'immobilisa face à l'écran qui se trouvait au-dessus du calice contenant les cendres. La mise en scène était parfaite. Tout se passait exactement comme prévu. Parmi les personnes présentes, il y eut un moment de doute auquel les images mirent rapidement fin.

     

    L'assemblée aperçut une salle de classe sur l'écran : c'était la classe de Ben. Deux garçons tiraient sur le pantalon de celui-ci tandis que tout le monde rigolait. La caméra fit alors un gros plan sur Ben. On pouvait lire la peur dans ses yeux. L'humiliation sur ses lèvres.

     

    (…)

     

    Coppola contemplait son œuvre avec satisfaction. C'était sans nul doute la première fois qu'un de ses films touchait un public aussi large. Vu les circonstances, il trouvait que ce n'était pas si mal filmé que ça. Même le son était de qualité acceptable. On entendait tout :

     

    «  - Dis, c'est vrai que les Martiens ont deux zobs ?

     

    - You want fuckie, fuckie, le Martien ? Ou you want suckie suckie ? »

     

    Les deux principaux intéressés se retrouvèrent tout à coup confrontés à leur image. Ils devinrent livides sous le feu des regards qui se tournèrent un à un dans leur direction. C'était comme une avalanche de reproches.

     

    Coppola se souvenait parfaitement de la scène. Il avait épargné à son drôle de camarade l'image avec le pantalon baissé. Dès que c'était devenu embarrassant, Coppola avait tourné sa caméra vers les spectateurs. Eux qui riaient. Eux qui chahutaient. Eux qui détournaient le regard parce qu'ils étaient gênés. Eux qui auraient voulu mettre fin à ce terrible spectacle mais qui ne disaient rien, ne faisaient rien. Eux qui étaient maintenant frappés par la main de Dieu.

     

    (…)

     

    Les dernières images défilèrent au ralenti et en boucle. Coppola brisa le silence :

     

    - C'est la dernière chose que Ben a écrite :

     

     

     

    Si jamais je ne parle

     

    Aujourd'hui mon silence hurle

     

     

     

    Tendez l'oreille

     

    Et entendez

     

    Ma blessure se réveille

     

    Écoutez :

     

     

     

    Nul besoin de pleurer pour souffrir

     

    Ni de parler pour avoir quelque chose à dire. » (p.104-107)

     

     

     

    (BenX de Nic BALTHAZAR)

     

     

     

     

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  •  

    « - Bon, tu vas tout me raconter. Qu'est-ce qui s'est passé, Clémentine ?

     

    Je ne réponds pas, je demande :

     

    - C'est quoi, un exhibitionniste ?

     

    Je perçois un petit cri étranglé au fond de sa gorge.

     

    Elle inspire profondément avant de parler :

     

    - C'est une personne qui a un comportement un peu bizarre. Il y a des hommes qui... comment dire ça simplement... qui montrent leur... qui montrent leur zizi aux passants, dans la rue ou dans les bois. En fait, ils le montrent à n'importe qui, n'importe où. Ils sont malades dans leur tête. Heureusement, le plus souvent, ils s'arrêtent là. Ils ne font rien de plus. Tu comprends ? Ça t'est arrivé ? C'était quand ? Pourquoi tu n'as rien dit, pourquoi tu n'en as pas parlé tout de suite ?

     

    J'ai envie de crier : « Pourquoi vous n'avez rien remarqué ? », mais je fais signe de la tête pour lui faire comprendre qu'elle a deviné.

     

    Elle me demande encore : « Il t'a touchée ? Il t'a fait mal ? »

     

    Cette fois-ci, je fais non de la tête. Mais le non, c'est seulement pour la première question. Même s'il n'a pas posé ses grosses mains dégueulasses sur moi, je n'avais pas envie de voir ce qu'il m'a montré. C'est ça qu'il m'a fait : il m'a forcée à voir.

     

    (…)

     

    Il m'a forcée à voir

     

    Je redresse la tête, je la regarde dans les yeux, j'inspire profondément et je lui crie au visage, même si elle se tient à quelques centimètres de moi :

     

    - Comment tu peux dire que c'est pas grave, que c'est fini ! Tu ne peux pas dire ça, maman. J'ai eu mal tellement j'ai eu peur !

     

    Je hurle, j'ai presque envie de la secouer pour qu'elle comprenne. Je ne peux plus m'arrêter de parler. Je lui raconte encore, je lui donne d'autres détails, son retard lundi dernier à la sortie du collège, tous ces lundis où je dois rentrer seule depuis qu’Émilie a déménagé, et l'année prochaine où je serai seule dans la rue tous les soirs. Et cette peur qui grossit, qui enfle, qui m'étouffe, qui m'empêche de vivre comme avant. Des larmes énormes continuent à envahir mes joues et ça me pique sous les yeux. Plus les mots sortent, plus je les crache, je les vomis de plus en plus fort : « Ce n'est pas fini, tu ne peux pas dire ça ! Jamais ! Tu ne sais pas ce que j'ai vécu. J'ai eu peur pendant des heures, des jours, des semaines entières. Personne ne m'a aidée. Et aujourd'hui, j'ai toujours aussi peur. Ça continue. Tu as bien vu, tout à l'heure dans les bois, j'ai même peur quand je suis avec toi. » Je me tais quelques secondes, puis je rajoute en hurlant : « Rien n'est fini. Tu es nulle, tu n'as rien compris ! » (p.67-71)

     

     

     

    (La camionnette blanche de Sophie KNAPP)

     

     

     

     

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  •  

    « - ça n'a pas trop d'importance, tente-t-il d'expliquer. Bastien m'a juste embêté une ou deux fois.

     

    - Embêté comment ? Insiste-t-elle.

     

    Valentin se sent de plus en plus accablé. La raison de ses retards répétés ne tient pas seulement à ses problèmes de crachats et de vélo crevé mais aussi à cette sensation qu'il éprouve chaque jour davantage. Et à la crainte que Bastien trouve bientôt une occasion nouvelle de le frapper. » (p.110)

     

     

     

    « Personne n'a compris ce qui a pris à Valentin d'aller trouver le principal (pas la C.P.E., le Grand Chef en personne !...) et de dénoncer la classe, alors que le « jeu des dominos », vous savez, n'était pas spécialement contre lui et qu'il en était même beaucoup moins victime que d'autres (…).

     

    je peux vous dire que, quand la punition nous est tombée dessus, ceux de la classe qui appréciaient encore un peu Valentin ou le prenaient en pitié, comme je l'avais fait tout au long du premier trimestre, eh ben même ceux-là, j'allais dire « lui ont déclaré la guerre », mais il ne s'agit pas de guerre... En fait, personne ne s'est plus intéressé à Valentin, il n'en valait pas la peine. On l'a... je cherche le mot.. ; « Ostracisé » ? Si vous voulez... Non, je ne connaissais pas ce mot, il n'est pas très beau, mais merci de me l'apprendre... Oui, c'est ça, on l'a rejeté... Pire, en fait : on l'a ignoré total, méprisé, rayé de la carte.. Oui, vous avez raison. Je reconnais que c'est terrible, comme situation, mais il l'avait bien cherché, non ?

     

    (…)

     

    Une question encore, si vous voulez, mais la dernière... Oui, il s'est bien « passé quelque chose » le jour de la punition... Je ne vais pas tourner autour du pot, on s'est un peu fait justice nous-même... Bastien vous l'aurait raconté s'il avait continué à venir... Non, bien sûr, pas toute la classe ! Dans ces occasions, il y a toujours des lâches qui fuient leurs responsabilités... Combien ? Je dirais que nous étions à peine une dizaine... Non, je ne vous donnerai pas les noms... Oui, je sais bien que vous n'êtes pas de la police, mais n'empêche, je n'ai pas envie de donner les noms... Un mot a circulé, genre : « On lui règle son compte ? » C'était comme un sondage, un vote. J'ai répondu : « Oui »...Et alors ? Je ne vois pas la contradiction... Au contraire, le fait d'être déléguée de classe me donnait toutes les raisons de ne pas laisser Valentin impuni ! Bastien a dû penser la même chose.

     

    Après, sur la façon dont on lui a réglé le compte, il y a eu beaucoup d'exagération. Il n'a pas saigné, que je sache, il n'a pas perdu un bras, ni un œil, ni même une dent... Et puis, les autres, les péteux qui n'ont pas participé, ils étaient quand même au courant... C'est pour dire... » (p.116-118)

     

     

     

    « - Relève-toi, Patapouf, lance Karim.

     

    - Tenez-le bien, ordonne Bastien.

     

    Il s'approche de Valentin fermement maintenu par Karim et Xavier et le frappe à la volée d'une gifle retentissante. Le sang reflue, et la marque blanche des doigts apparaît sur la joue de Valentin.

     

    Sous la violence du coup, et comme s'il l'avait lui-même reçu, Antoine a aspiré bruyamment sa salive et rentré la tête dans les épaules. Il refoule aussitôt cet élan d'empathie pour donner à Valentin un coup de pied aux fesses :

     

    - Avance, Gros-Cul...

     

    Et, réagissant à un reniflement, il ajoute :

     

    - C'est ça, chiale, tu pisseras moins.

     

    Ils ont peur d'agir comme ils agissent, mais l'excitation leur donne du courage. Alice avance en éclaireuse pour s'assurer que l'escalier est désert. Elle se retourne pour faire signe que tout va bien et surprend un éclat de haine dans le regard mouillé de larmes de Valentin.

     

    - Pas la peine de faire ta tête de victime. Tu l'as bien cherché, non ?

     

    Bastien ricane. » (p.123)

     

    Descente aux Enfers

     

    « - Aide-nous ! lui demande Bastien. Tiens-lui solidement les jambes.

     

    Alice obéit tandis que Bastien se penche sur Valentin pour lui défaire son pantalon. Valentin se débat. Alice n'a pas assez de force pour lui maintenir les deux pieds.

     

    - Bon dieu ! s'indigne Bastien à l'adresse de Karim occupé à ramasser son rouleau de scotch. Qu'est-ce que tu glandes ? Aide Alice !

     

    Karim s'empare du pied droit de Valentin toujours maintenu à terre par Antoine et Xavier. Bastien abaisse le pantalon jusqu'à mi-cuisses, puis le slip.

     

    Il se fait un silence de mort. Même Valentin cesse de se débattre et de grogner dans son bâillon.

     

    - On va te couper la nouille, déclare Bastien.

     

    - Et on va la mettre à cuire, enchaîne Karim mauvais comédien et semblant réciter une réplique que lui aurait soufflée son chef.

     

    Alice, mal à l'aise elle aussi, ose à peine regarder « la nouille » de Valentin.

     

    - ça va. On arrête maintenant.

     

    - Ma parole, s'écrie tout à coup Bastien, il a des poils ou quoi. Regardez, ils sont tout blonds. Si ça se trouve c'est une perruque, ricane-t-il encore en tirant sur le duvet pubien de Valentin qui se cambre de douleur.

     

    - C'est bon, ça suffit, il a compris, maintenant, insiste Alice. Je vous préviens, je lâche sa jambe.

     

    - Okay, dit Bastien. On arrête là.

     

    Ils libèrent Valentin. Bastien empêche Karim d'enlever le bâillon trop tôt :

     

    - En dernier seulement.

     

    Il défait les nœuds de tissu qui enserraient les bras de Valentin et remet l'essuie-mains en fonction.

     

    - Maintenant, le bâillon, ordonne-t-il à Karim.

     

    Libéré de l'adhésif, Valentin se penche en avant et crache des lambeaux de mouchoirs en papier avec des haut-le-coeur tout en remontant du mieux qu'il peut slip et pantalon avant de se précipiter dans le W.-C. le plus proche pour y vomir.

     

    - Tu n'oublieras pas de tirer la chasse et de laisser l'endroit aussi propre qu'il était en rentrant, lui ordonne Bastien.

     

    Et il ajoute à l'adresse d'Alice et de ses copains :

     

    - Fin de l'opération « Justice imminente ». Dispersion du commando ! » (p.126-128)

     

     

     

    «  Beaucoup de têtes se retournent, rigolardes. Ils savent tous. La nouvelle a dû circuler et ils s'en délectent. Il est le Salaud de l'histoire, celui qui les avait dénoncés, et les Gentils ont triomphé. Il est le Traître puni. Les mots de Bastien ont dû porter : « Justice imminente ». (p.130)

     

     

     

    « Ce qui s'est passé cette année-là, ce que notre classe a fait subir collectivement à Valentin est dégueulasse. Parce qu'on peut toujours accabler Bastien, et je suis la première à le faire, et affirmer que, sans lui, ce ne serait pas arrivé... Il n'empêche que... et c'est cette petite phrase que vous allez noter et surligner et souligner en rouge trois fois : TOUTE LA CLASSE SAVAIT ET PERSONNE N'A RIEN DIT. » (p.133)

     

     

     

    « - Autant entrer dans le vif du sujet, Monsieur Boubard, « absence » est un mot qui va comme un gant à Valentin, à notre grand désespoir...

     

    Franck Boubard a levé des sourcils perplexes.

     

    - Ne vous méprenez pas, a poursuivi Sophie Biolle, il ne s'agit pas d'absence effective, si je puis dire, encore qu'il y ait un problème de retard préoccupant, mais Valentin est en cours sans y être . Il passe son temps seul au fond de la classe. Il ne suit plus, il ne s'intéresse plus... Non par manque d'aptitude, de cela nous sommes certains, et je parle ici au nom de tous ses professeurs... Non, il a d'excellentes capacités, il l'a prouvé au premier trimestre, mais les choses se sont dégradées, et particulièrement ces dernières semaines où votre fils n'a plus aucune motivation... » (p.139)

     

     

     

    «  C'est fou comme on peut être capable de refuser une vérité qu'on a tous les jours devant les yeux, et comme on trouve en soi la capacité de s'en accommoder au point presque de la nier, de grandement la sous-estimer en tout cas.

     

    Notre premier réflexe a été d'en vouloir aux enseignants et à leur principal. Vous savez, c'est vieux comme le monde : quand le message est trop dur à avaler, on s'en prend au messager. Cela dit le collège a une lourde responsabilité dans cette histoire. Eux non plus n'ont pas su déceler ce que dissimulait le changement de comportement de Valentin, son repli. Mais comment pourrait-on leur jeter la pierre, alors que nous avons, nous les parents, fait preuve du même aveuglement ? » (p.155-156)

     

     

     

    «  Valentin sait qu'il ne tuera jamais Bastien d'un tir de carabine, de celles qui sont en vente libre aux États-Unis où, de temps en temps, un collégien devenu fou provoque un massacre.

     

    Ce n'est pas un massacre que veut provoquer Valentin. Une vie à supprimer. Une seule.

     

    « La mienne », songe-t-il aussitôt. Ce n'est pas qu'il veuille mourir, exactement ; mais être mort, ça oui, sûrement. Il en a envie. » (p.195-196)

     

     

     

    « L'idée de s'armer lui est venue la semaine dernière. Pour se protéger d'une menace proférée par Bastien, hors de la présence de Karim et de Xavier : « Un de ces jours, aujourd'hui ou demain, quand je l'aurai décidé... », accompagnée du geste du pouce tranchant la gorge.

     

    « M'insulter ne lui suffit plus, a compris Valentin, abîmer mes affaires, me frapper, prendre mon argent. Il veut vraiment me tuer. Il va le faire avant la fin de l'année scolaire. » (p.211-212)

     

     

     

    (Harcèlement de Guy JIMENES)

     

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    « - Ton imaginaire et ton goût pour l'écriture font de toi quelqu'un de spécial, quelqu'un de différent, et c'est ce que ces filles de quatrième voient et jalousent.

     

    Il ne voulut pas leur coller trop vite l'étiquette de harceleuses pour ne pas effrayer Ella, mais la plaisanterie pouvait se transformer en harcèlement. Le côté artiste d'Ella n'était pas seul en cause. Son androgynie devait aussi intriguer ou perturber ses camarades. » (p.85)

     

     

     

    « Tout avait commencé le mardi, jour du cours de latin avec madame Nozière, mais aussi jour où Ella croisait la route des cinq filles de la 4èC, Marine, Alice, Selma, Mélanie et Hannah. Remontée à bloc par sa séance de la veille avec son psy, Ella se disait qu'elle n'avait pas peur d'elles, qu'elle pouvait ignorer leurs « Pas carré, Pas carré » martelés dans son dos, et leurs cuicuis sifflotés sur sa route parce qu'elle s'appelait Kuypens. C'était bête, cruel, mais surtout puéril ? «  ça ne m'empêchera pas de grandir » était devenu le mantra d'Ella. Elle s'était fait un programme sportif pour devenir costaud, des pompes, des haltères, le trajet en courant jusqu'au collège, et tout un programme de lectures pour devenir écrivain. » (p.125)

     

     

     

    «  - Elles t'ont piqué un truc, dit-il en désignant précisément le sac marin. Un cahier.

     

    (...)

     

    - Comment tu sais, toi ?

     

    - Parce que je les ai vues dans la cour. Marine disait que tu avais écrit un roman culte et elle demandait qui en voulait une feuille. Elle les distribuait à des gens de sa classe. Je... Je t'en ai récupéré une feuille.

     

    Il lui tendit une page du cahier avec l'air de quelqu'un qui s'attend à être remercié.

     

    - Mais j'en veux pas, fit Ella en reculant de dégoût.

     

    Son cahier dépecé, souillé, violé. Elle tourna le dos à Jimmy et partit en courant vers son arrêt de bus. Une fraction de seconde, elle eut envie de se faire écraser. Et puis non. Ça ne m'empêchera pas de grandir.

     

    Assise dans le bus, le sac serré contre sa poitrine, elle s'interdit de pleurer en public. Mais dès qu'elle fut dans sa chambre, elle s’aplatit sur son lit, le visage enfoncé dans l'oreiller. Mais pourquoi ? gémit-elle. Qu'est-ce qu'elle avait fait ? Qu'est-ce qu'on lui voulait ? Elle sentait chez ces filles le désir de la mettre à nu. Pourquoi ? Parce qu'elle était quelqu'un de spécial, quelqu'un de différent. Mais alors, c'était un crime ? » (p.127-128)

     

     

     

    «  Alice savait maintenant que Marine l'avait rendue complice de sa propre mauvaise action, et la feuille lui brûlait la main. On y lisait les mots poison, vénéneux, mortel. Elle en fit une boule, qu'elle jeta dans sa corbeille à papier.

     

    On était mardi, et Alice devait retrouver Ella en cours de latin. Alice n'avait pas de sympathie pour cette fille qu'elle traitait de « bolosse ». Mais elle ne voyait pas non plus pourquoi les autres s'acharnaient sur elle. S'il lui était arrivé de chuchoter « Pas carré, Pas carré » dans son dos, c'était pour faire comme le reste de la bande, et peut-être pour détourner d'elle les moqueries cinglantes de Marine. Elle porta de nouveau la main à ses lèvres. Ce bouton, putain ! Ella Kuypens n'avait pas de boutons. Elle avait une peau de bébé, que les autres s'amusaient à faire rougir en la tourmentant. » (p.135-136)

     

     

     

    «  Pendant le cours de latin, l'une d'entre elles avait réussi à se glisser dans son dos et à renverser de l'encre sur la bande blanche de son sac. Elles savaient d'instinct ce à quoi elle tenait, ce qui pouvait l'atteindre. Ce n'était pas sa mise à nu qu'elles voulaient, c'était sa mise à mort. » (p.138)

     

    Quelqu'un de spécial

     

    «  - C'est depuis que je suis née que je suis en colère, dit-elle enfin. Je voulais naître en garçon.

     

    - Il y a eu erreur à la livraison.

     

    - C'est pas drôle.

     

    - Non, Mais ça n'empêche pas de garder le sens de l'humour.

     

    Elle donnait des petits coups de pied dans son sac marin, passant sa rogne sur ce symbole de son moi au masculin.

     

    - Essaie de comprendre mon point de vue, Ella. Je préfère que tu exprimes ta colère d'être une fille que de faire semblant de croire que tu es un garçon. En thérapie, on recherche une chose qui se rapproche de la vérité, non ?

     

    Elle aimait qu'il lui parle de cette façon. Il ne la traitait pas en enfant.

     

    - La vérité, dit-elle, c'est que je ne VEUX pas être une fille et que je ne PEUX pas être un garçon.

     

    - Ni l'un ni l'autre... Ou les deux ?

     

    La question resta en suspens. » (p.168-169)

     

     

     

    «  Son téléphone, resté au fond de sa poche de veste, lui signala l'arrivée d'un SMS. Elle le lut sans comprendre. « Travelo ». C'était tout. « Travelo ». Le message provenait de Jimmy. Elle n'avait pas l'intention de répondre, même pour avoir des éclaircissements. Or dix minutes plus tard, un nouveau SMS l'avertit : « Check ton mur ». C'était une invitation à aller voir sur Facebook. Ce qu'elle fit, intriguée, et même déjà inquiète, car il y avait quelque chose de menaçant dans le ton employé. Sur le mur de son Facebook, elle vit la photo que venait d'y poster Jimmy. C'était elle. Elle habillée en Elliott et s'offrant béatement aux rayons du soleil. Au-dessous de la photo, ce commentaire : « C pa une fille, c un mec ! » Elle se sentit devenir glacée comme lors de ses précédents évanouissements. Vite, détruire cette image. Une heure plus tard, un nouveau SMS la fit sursauter. Cette fois-ci, il était de Marine. « Travelo ». Jimmy avait partagé la photo. Dès lors, les filles de la 4è C firent pleuvoir les SMS, mêlant insultes et propos injurieux dans une surenchère délirante. C carnaval ? Ou ta mi t seins ? T'attends le client ? C un type qui s habille en fille au collège ou c une fille qui drag les filles habillée en garçon ? Drag queen ou drag king ?

     

    Le lendemain, une fille de sa classe, qui ne lui parlait jamais, l'avait accueillie, d'ailleurs sans méchanceté, par un : « T'as pas mis ta cravate aujourd'hui ? » Tout le monde était au courant. La photo avait circulé d'écran de téléphone en écran d'ordinateur, la beauté androgyne de la jeune Ella suscitant de plus en plus de commentaires sales, sexistes et homophobes. Pour rigoler, bien sûr. Le vendredi, Ella passa une partie de la journée à l'infirmerie. Le lundi, elle vomissait. » (p.268-269)

     

     

     

    « - Un travelo, c'est un travesti. Un homme qui s'habille en femme.

     

    - Et pas une femme qui s'habille en homme ?

     

    - Si... peut-être. Mais c'est moins voyant, parce qu'il y a beaucoup de femmes qui portent un pantalon, tandis que des hommes qui portent une robe...

     

    - Il y a une fille en 4è A qui s'habille comme un mec. Elle ressemble vraiment à un garçon. Elle est toute plate, elle a les cheveux rasés, elle met une cravate. Les autres disent que c'est un travelo.

     

    Quelle drôle de conversation, se dit Louise. On se croirait dans un show de téléréalité. Thème de l'émission de ce samedi : J'ai changé de sexe, et alors ?

     

    - C'est sans doute une ado qui n'est pas très bien dans sa peau. (...)

     

    - Les autres lui envoient des SMS pour la traiter de transsexuel.

     

    - Mais c'est n'importe quoi ! S'insurgea Louise.

     

    - Et du coup, elle ne vient plus au collège

     

    Alice raconta les choses dans le détail, la photo d'Ella qui circulait, les ragots de Jimmy et de Mélanie, et les moqueries qui étaient devenues des insultes. Louise finit par lâcher le mot harcèlement et même cyberharcèlement. Alice acquiesça, soulagée. Elle avait besoin que les choses soient nommées. Qu'on lui dise où est le bien, ou est le mal. » (p.294-295)

     

     (Sauveur & Fils saison 2 de Marie-Aude MURAIL)

     

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