• « Il accéléra le pas. Sa mère allait s'inquiéter. Elle avait trop souffert elle aussi. Et son père.

     

    Maintenant encore, malgré leur nouvelle vie, s'il avait quelques minutes de retard, elle imaginait le pire. Sur Internet, elle avait découvert qu'il existait des blogs, des clubs antiroux...

     

    Du coup, il n'avait pas parlé de cette première photo. L'angoisse de ses parents aurait décuplé la sienne.

     

    (…)

     

    La photo avait circulé sur tant de portables. Il ferma les yeux. Elle surgit aussitôt à son esprit : on y voyait son visage à tête de rat, avec une chevelure longue, envahissante, presque rouge, et deux incisives bien pointues le ridiculisant.

     

    En dessous, une phrase :

     

    « Pourquoi faire des expériences sur des rats quand on a des roux ? »

     

    La rage, la haine, le désespoir l'avaient envahi.

     

    Il avait serré les dents et préféré faire comme si de rien n'était. Subir les regards. Éviter les camarades. Raser les murs. Devenir invisible.

     

    Il n'avait pas le courage d'affronter. 

     

     

     

    Il faisait doux, c'était le printemps.

     

    En lui, le noir, l'hiver.

     

    Cette première photo l'avait anéanti, le hantait encore.

     

    Et les suivantes. Et les insultes, l'enfer.

     

    (…)

     

    Il s'était souvent senti traqué. Depuis cette première photo, il était prisonnier dans une ratière. (…)

     

     

     

    Il aurait dû réagir. Leur dire merde à tous. Tous ceux qui avaient reçu cette première photo. Tous ceux qui laissaient s'appesantir sur lui leur regard méprisant, moqueur... haineux ou hypocrite. Les regards compatissants non plus, il ne les supportait pas. » (p.12-13)

     

     

     

    « Mme Marchal, des larmes dans la voix, lui avait tout raconté. L'enfer de son fils à l'école primaire, puis au collège, à cause de la couleur de ses cheveux. Le déménagement de Villeurbanne...

     

    - Mon mari et moi, pensions qu'au lycée Anton n'avait plus de problème. Nous n'avons rien vu !

     

    Elle avait failli éclater en sanglots. Elle était partie après lui avoir remis la lettre.

     

    La vie faite à Anton par ses camarades portait un nom : harcèlement.

     

    Elle relut la lettre.

     

     

     

    « Je vous demande pardon.

     

    Je n'en pouvais plus.

     

    Je vous aime.

     

    Votre fils, Anton »

     

     

     

    (…)

     

    Racisme anti-roux

     

    - C'est pas vrai ! Murmura Salomé devant les quatre photos apparues sur l'ordinateur de Karine.

     

    « Pourquoi faire des expériences sur des rats quand on a des roux ?

     

    Au Moyen-âge, on exterminait les roux, animaux maléfiques.

     

    Tu ne vieilliras pas, tu rouilleras.

     

    Noyons le pou ! »

     

    - Les phrases sont terribles et la représentation d'Anton... Je reçois ça, moi... je pète un plomb, continua-t-elle. » (p.96-97)

     

     

     

    « - Et Hakim et Saïdou ? Demanda Salomé.

     

    L'interrogatoire des deux adolescents s'était avéré éprouvant aussi. Aucune remise en cause de leur part. Aucun regret. « A chacun d'en baver du racisme, non ? » Leur réaction avait fait une sacrée entaille dans l'enthousiasme de la jeune lieutenante.

     

    - Ils seront poursuivis pour harcèlement...

     

    - Ils risquent quoi ?

     

    - Je ne sais pas... Je ne suis pas juge...

     

    Salomé ne dit plus rien.

     

    Elle se souvint : en classe de seconde, une prof courageuse, avait fait étudier aux élèves, un court reportage d'un journaliste aux actualités nationales.

     

    Elle se rappelait le texte par cœur.

     

    « En Israël la Gay Pride est prévue le vendredi 10 novembre.

     

    Les juifs orthodoxes, les chrétiens et les musulmans s'unissent contre la Gay Pride. Et deux chanteurs connus : un juif et un musulman s'unissent un temps, le temps d'une chanson... contre la Gay Pride. »

     

    A cause de cet article, peut-être, elle avait tenu à intervenir dans la classe d'Anton.

     

    Le temps de quelques photos, trois adolescents, un garçon français de souche, un autre d'origine africaine, et un troisième d'origine maghrébine, qui ne s'aimaient pas, s'étaient entendus, s'étaient unis pour... mettre à mort un roux.

     

     

     

    L'unisson pour le rejet, la discrimination, le harcèlement. L'idée n'était pas seulement dérangeante, inquiétante, elle était terrifiante, atterrante. » (p.168-169)

     

     

     

    (Mise à mort de Claire MAZARD)

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  •  

    Juste une femme

     

     

     

    « Petit monsieur petit costard

     

    Petit' bedaine

     

    Petit' sal'té dans le regard

     

    Petit' fredaine

     

    Petite poussée dans les coins

     

    Sourire salace

     

    Petit' ventouses au bout des mains

     

    Comme des limaces

     

    Petite crasse

     

     

     

    Il y peut rien si elles ont des seins

     

    Quoi il est pas un assassin

     

    Il veut simplement apprécier

     

    C'que la nature met sous son nez

     

     

     

    Mais c'est pas grave

     

    C'est juste une femme

     

    C'est juste une femme à saloper

     

    Juste une femme à dévaluer

     

    J'pense pas qu'on doive

     

    S'en inquiéter

     

    C'est pas un drame

     

    C'est juste une femme

     

     

     

    Petit ami petit patron

     

    Petit' pointure

     

    Petit pouvoir p'tit chefaillon

     

    Petite ordure

     

    Petit voisin p'tit professeur

     

    Mains baladeuses

     

    Petit curé petit docteur

     

    Paroles visqueuses

     

    Entremetteuses

     

     

     

    Il y peut rien si ça l'excite

     

    Et qu'est-ce qu'elle a cette hypocrite

     

    Elle devrait se sentir flattée

     

    Qu'on s'intéresse à sa beauté

     

    C'est pas grave ?

     

    Mais c'est pas grave

     

    C'est juste une femme

     

    C'est juste une femme à humilier

     

    Juste une femme à dilapider

     

    J'pense pas qu'on doive

     

    S'en offusquer

     

    C'est pas un drame

     

    C'est juste une femme

     

     

     

    Petit mari petit soupçon

     

    P'tite incartade

     

    P'tite plaisant'rie de salon

     

    P'tite rigolade

     

    Fermer les yeux on n'a rien vu

     

    Petit' souffrance

     

    Et trembler qu'une fois de plus

     

    Il recommence

     

    Inconvenance

     

     

     

    Quoi si on peut plus plaisanter

     

    On n'a plus qu'à s'la faire couper

     

    Non c'est vrai il est pas un monstre

     

    Et c'est l'épouse qui prend la honte

     

     

     

    Mais c'est pas grave

     

    C'est juste une femme

     

    C'est juste une femme à bafouer

     

    Juste une femme à désespérer

     

    J'pense pas qu'on doive

     

    S'en séparer

     

    C'est pas un drame

     

    C'est juste une femme

     

     

     

    Mais dès qu'une femme

     

    Messieurs Mesdames

     

    Est traitée comme un paillasson

     

    Et quelle que soit la façon

     

    Quelle que soit la femme

     

    Dites-vous qu'il y a mort d'âme

     

     

     

    C'est pas un drame

     

    Juste des femmes

     

     

     

    Anne SYLVESTRE – Juste une femme (2013)

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  •  

    « Et puis, très vite, de nouveaux ennuis sont arrivés. Non plus ceux d'avant les vacances (encre projetée sur les vêtements, croche-pieds dans le couloir, pincements, moqueries, insultes) mais crachats et vélo crevé. » (p.84)

     

     

     

    « Le matin, aux abords du collège, Valentin doit passer sous une passerelles métallique. C'est de là-haut qu'on lui a craché dessus presque tous les jours du mois de janvier. Ceux qui l'ont pris pour cible ne se sont jamais montrés, ils n'avaient pas besoin de se pencher par-dessus le parapet, il leur suffisait de cracher dans l'espace entre les lattes de bois qui composent le plancher de la passerelle. Quand les crachats se sont calmés, c'est à son vélo qu'ils ont décidé de s'en prendre.

     

    Valentin n'oublie pas ce que lui a recommandé Alice, un jour : « Plus tu réagis et plus ça les excite ! Ça leur passera. » (p.89)

     

     

     

    « - Rien ne cloche, affirme-t-il. Le souci, c'est lui. C'est Bastien Lange.

     

    Un sourire incrédule s'épanouit sur le visage d'Yves Letalandier.

     

    - Tiens donc !

     

    - C'est Bastien qui crève mes pneus, qui me bouscule...

     

    -... Qui oublie de mettre l'alarme à mon réveil, poursuit le principal sur le même ton.

     

    Indifférent à l'ironie du chef d'établissement, Valentin reprend :

     

    - Il m'a frappé au ventre, mardi au gymnase.

     

    Yves Letalandier prend quelques secondes de réflexion avant de trancher :

     

    - Quoi qu'il en soit, Bastien Lange me semble plus « fair play » que toi. Lui au moins ne se permet pas de dire du mal de Valentin Boubard... Vous vous entendiez si bien... Que s'est-il passé ? Une histoire de fille ? La belle Alice Pregoszian ?

     

    Valentin rougit violemment.

     

    - Vous ne me croyez pas, lance-t-il buté pour cacher sa gêne. » (p.106)

     

     

     

    « Valentin se passe la main dans les cheveux. Du sang poisse sous ses doigts. Bastien sort un mouchoir en papier de sa poche.

     

    (…)

     

    Valentin n'a pas besoin de s'interroger longtemps sur la soudaine sollicitude de Bastien pour comprendre que son persécuteur craint d'être allé trop loin.

     

    - Je vais le dire, assure Valentin aussi calmement que possible et refusant le mouchoir de Bastien pour prendre un des siens. Je vais le dire que c'est toi qui m'a lancé un caillou du haut de la passerelle.

     

    - Je vais le dire, je vais le dire ! singe Bastien.

     

    - Ils seront obligés de me croire.

     

    - C'est ça, dit Bastien, et moi je leur parlerai de ta petite coquillette à la sauce blanche.

     

    Valentin sent son ventre se nouer. Inconsciemment, il ralentit le pas.

     

    - Ben oui, continue tranquillement Bastien. Je leur dirai que tu te tripotes la nouille au fond de la classe pendant les cours.

     

    - C'est même pas vrai ! se défend Valentin.

     

    - Oh, moi, tu sais, je ne fais que répéter ce qui se raconte dans la classe... Alors, ça te fait quoi, quand tu jutes ? Tu te sens décoller ?

     

    Le verbe « juter » n'est pas dans le vocabulaire de Valentin et il ne comprend pas précisément ce que lui reproche Bastien. » (p.169-170)

     

     

     

    «  Bastien ne se sépare pas de son morceau de silex. De temps à autre, il le sort de sa poche et le tient dans son poing serré, ne laissant dépasser qu'une extrémité avec laquelle il s'amuse à « rayer du Valentin » : ses classeurs, ses livres, ses vêtements. D'autres fois, il frappe au niveau du bras ou des omoplates, déclenchant une douleur aiguë.

     

    Valentin encaisse. Quand la révolte gronde en lui et qu'il est au bord de craquer, Bastien le perçoit instantanément et s'arrête toujours à temps. » (p.181)

     

    Persecutor en personne

     

    « Et pour être stimulé, Valentin l'a été. Par Stimulator en personne. Persecutor. Et il m'arrivait d'être fascinée par le talent de dissimulateur (Dissimulator !) de Bastien. Il y aurait de quoi chauffer la ville pendant dix ans avec les crayons à papier qu'il sortait négligemment de la trousse de Valentin et qu'il ne lui rendait qu'après les avoir brisés en deux. On pourrait caler toutes les vieilles armoires bancales de la région avec les gommes "empruntées" à Valentin et restituées à leur propriétaire débitées à coups de ciseaux, en deux ou quatre morceaux.

     

    Si l'encre pouvait faire avancer les voitures, on roulerait jusqu'à la fin des jours avec le contenu des cartouches que Bastien vidait dans les affaires de Valentin, dans sa trousse, dans son cartable, dans ses poches, dans son cou...

     

    Il avait l'art de s'arrêter au bon moment pour n'être pas pris en faute. Jamais rien de trop. Et surtout, sa victime ne protestait pas, ne protestait plus. 

     

    (…)

     

    Bastien avait réussi à le soumettre, et à soumettre les autres aussi dans le silence, la complicité plus ou moins active. Il tenait Valentin à sa merci. Il n'avait qu'à prononcer le mot « nouille » ou « coquillette » et Valentin rougissait et bafouillait un « arrête » suppliant. Quand Bastien, grand prince, consentait à l'épargner, Valentin lui lançait un regard servile, mouillé de reconnaissance.

     

    Je caricature à peine. J'en ai voulu à Valentin de se comporter ainsi. Aujourd'hui, avec le recul, je ne le juge plus. Je sais qu'il n'avait pas le choix. Bastien avait pris un ascendant terrifiant sur lui.

     

    (…)

     

    Tout ne se passait pas au vu et au su de la classe. En artiste de la dissimulation, Bastien savait ce qu'il pouvait se permettre devant les uns ou les autres. J'ai surpris par hasard une conversation entre lui et sa victime. En fait de conversation, Bastien était seul à parler. Il demandait à Valentin s'il avait « le fric ». Et un billet a circulé de la main de l'un dans celle de l'autre. Un assez gros billet, le bleu, celui de vingt euros.

     

    J'ignorais par quel chantage Bastien obtenait cet argent et peut-être cela ne s'était-il produit qu'une fois, mais quoi qu'il en soit, ce jour-là, il rackettait bel et bien sa victime.» (p.185-187)

     

     

     

    «  Ce que je découvris alors en regardant machinalement dans la cour, un étage plus bas, aurait pu sembler anodin : Valentin et Bastien étaient assis l'un à côté de l'autre, face à deux de leurs camarades. Ils avaient rapproché des bancs. Valentin se mit à sortir de ses poches une assez grosse quantité de goûters, j'entends par là des barres chocolatées, des paquets de petits gâteaux, qu'il distribua aux autres.

     

    Cela m'intrigua et quand j'en eus fini avec la documentaliste, je regardai de nouveau par la fenêtre. Je surpris alors un geste de Bastien, d'une brièveté et d'une violence inouïes, pour frapper le genou de Valentin avec un objet qu'il serrait dans sa main. Valentin se tordit de douleur et je le vis articuler une protestation que je ne pus entendre, bien sûr. Mais il est resté en compagnie des trois autres, comprenez-vous, il ne s'est pas séparé d'eux et ils ont continué comme si rien ne s'était passé ! Le décalage entre la violence du coup et la soumission de Valentin m'a mis extrêmement mal à l'aise.

     

    Voilà ce qui m'a convaincu d'explorer l'hypothèse du harcèlement. Mais vous êtes bien placée pour le savoir, dans ce domaine nous manquions de protocoles, il ne s'agissait pas encore d'un sujet sur lequel nous nous penchions facilement. Il fallait, et il faut encore, vaincre des résistances. » (p.200-201)

     

     

     

    (Harcèlement de Guy JIMENES)

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  •  

    Cancre ?

    planche extraite du Nouveau Larousse Universel en 2 volumes (1948)

     

     

    « Tous décrivent un calvaire fait d'humiliation, de honte et de punitions. « Démarrer sa vie de petit enfant en étant rejeté et humilié, cela crée des symptômes durables dans la construction d'un être humain », assure Réjane Varrod.

     

    Même quand arrive le succès, ou du moins une forme d'accomplissement personnel, les morsures de l'échec scolaire ne s'effacent pas d'un coup de baguette magique. (…)

     

    Avec cent cinquante mille jeunes qui décrochent chaque année, la réalisatrice réaffirme la nécessité pour l'école de la République de mieux considérer les élèves en difficulté : « Quand un enfant travaille mal, même s'il fanfaronne, il souffre. Il faut s'en occuper. » (p.99)

     

     

     

    (« Quand les mauvais élèves s'élèvent », article d'Emmanuelle SKYVINGTON pour Télérama n°3530 à propos du film documentaire de Réjane VARROD)

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  •  

    « Cette expression contrite de mauvaise conscience et de désespoir.

     

    Ce regard, c'est celui de quelqu'un qui est acculé et qui a peur...

     

    Il obéit à un ordre, c'est tout. Et il sait ce qu'il lui en coûtera s'il n'obéit pas... » (p.25-26)

     

     

     

    « - J... J'ai rien dit !! Croyez-moi !!

     

    - Ta gueule ! T'avais qu'à pas t'faire piquer !! Et puis d'abord, t'es passé d'vant le détecteur ! Pourquoi tu crois qu'ils t'ont chopé !? C'est ton attitude, Ducon !!

     

    T'es incurable, mec, y'a rien à faire... On n'a plus qu'à t'foutre la bite à l'air... et voir c'que les filles en pensent.

     

    - Wow ! J'veux voir ça !!

     

    - Non... pas ça !! Lâchez-moi !!

     

    - « Pas ça !! Lâchez-moi !! » Ha ha !

     

    - Ben non, on va pas te lâcher.

     

    - Arrêteez !!

     

    - Aaah, dégueulasse !!

     

    - Regardez-moi c'te tarlouze !!

     

    -Enfin, c'est fun, j'prends une p'tite photo.

     

    - Ouais.

     

    - Kamoi. Si jamais on a des emmerdes avec les flics, ou les profs... j'te crève. Pigé !?

     

    - Shimoyama... j'ai rien dit...

     

    - Oh, mais il insiste, putain ! Tu cherches vraiment à c'qu'on t'fasse le cendrier !

     

    - !! Hiii !! NOOOOON !!

     

    - Fous pas l'camp !!

     

    - T'aime ça, toi aussi, avoue ?

     

    - Interdiction de jeter des mégots sur la voie publique...

     

    - C'est ça ! Fumons écolo !!

     

    - RR – RHA – HAA- AAA – AAA – AA !!!

     

     

     

    (...)

     

     

     

    4 ans ont passé depuis... et mes brûlures me lancent encore !

     

    Impossible d'oublier...

     

    Les dents de devant cassées... mon œil droit presque aveugle... bouclé une demi-journée dans un vestiaire métallique... forcé à boire dans la cuvette des chiottes... emmené au poste pour vol à l'étalage... obligé de renoncer à mes études...

     

    Et cette haine... sans borne... du genre humain !! » (p.36-43)

     

     

     

    « Mourir... qu'est-ce que ça veut dire ? Que... que tout s'en va, disparaît... rêves... espoirs... avenir... passé... Tout... s'évanouit proprement... même cet abominable passé...

     

    Vieux torchons... déchets de bouffe... bestioles... merdes de chien... cuvettes de chiottes... sacs de sable.... mon existence et mon caractère totalement bafoués, c'était comme si j'étais devenu un déchet humain...

     

    Alors que je me relevais à peine de cette vie infernale... alors que je retrouvais tant bien que mal ma normalité... est-ce que j'ai pas assez souffert comme ça !? » (p.50-51)

     

    Un déchet humain

     

    « - T'as pas idée, hein, de ce que j'ai pu en chier... à cause des photos que t'as envoyées, après ça !?

     

    Tout le bahut se foutait de moi, j'me faisais même tabasser par des mecs que j'connaissais pas !!

     

    - Je... je...

     

    - J'avais peur de toute la ville, j'pouvais plus sortir !!

     

    - Je... je... mais je... Je me souviens de rien !!

     

    - Te fous pas d'moi !!!

     

    Dix mois ! Ça a duré dix mois, que j'croyais tous les jours que j'allais crever !!

     

    Et maintenant, ça fait quatre ans que votre souvenir me hante !! Impossible d'y échapper !!

     

    Et tu m'dis qu't'as oublié ! Tu t'fous d'ma gueule ?!

     

    Et si on faisait une petite vidéo où tu te fais troncher ? On pourra l'envoyer par mail !!

     

    - !!

     

    - Comme ça, tout le reste de ta vie, tu te souviendras... que j'étais un homme, et que j'ai existé !!

     

    - NNNOOOOOOOOOON !!! » (p.65-68)

     

     

     

    « - (à Shimoyama, devenu apprenti coiffeur) Le coup du cendrier, tu t'en souviens ?

     

    - O... oui.

     

    - Vous écrasiez vos clopes sur mon crâne tous les jours. Et voilà le résultat !! (Kamoi soulève un postiche-perruque pour révéler son cuir chevelu plein de cicatrices)

     

    Comment tu veux t'entraîner sur moi !? Hein !?

     

    - ...

     

    - Et il n'y a pas que le crâne.

     

    J'ai 4 fausses dents sur le devant... et l'oeil droit presque aveugle.

     

    Je suis encore suturé et brûlé de partout...

     

    Mais le plus grave, c'est dans ma tête !!

     

    Après tout ce que vous avez infligé à mon identité... j'ai touché le fond de l'humiliation... » (p.80-81)

     

     

     

    «  C'est le môme qui a piqué quelque chose au magasin, hier.

     

    (…)

     

    - Tu vas te laisser taper dessus encore longtemps !?

     

    Ou est-ce que tu te dis que tu te vengeras un jour... et qu'il suffit de serrer les dents en attendant ?

     

    Rien ne te garantit... que tu vivras jusque-là.

     

    Mettons même que tu deviennes fort et capable de te venger. A ce moment-là , les autres t'auront oublié... Quel intérêt y a-t-il à se venger d'eux, dans ces conditions ?

     

    Si tu as envie que ça change... c'est maintenant qu'il faut agir.

     

    Si tu dois péter les plombs un jour... autant que ça soit maintenant !

     

    Si tu veux combattre la fatalité... Fais-le maintenant. » (p.95-99)

     

     

     

    (Ikigami T.1 de Motorô MASE)

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  • Un défi morbide

     

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    Pourquoi ?

     

     

     

    Pourquoi ?

     

    Pourquoi je ne peux pas être heureux ?

     

    Pourquoi ne puis-je me satisfaire de ma vie comme le font les autres ?

     

    Pourquoi rien ne m'apaise jamais ?

     

     

     

    Je n'en peux plus...

     

    La vie me pèse.

     

    J'aspire à un repos définitif.

     

    Ne plus avoir l'impression de toujours me battre en vain.

     

    Qu'est-ce qui me retient encore ici-bas ?

     

     

     

    Je ne veux plus me mentir.

     

    J'ai trop joué la comédie.

     

    J'étais si fier de mon masque impénétrable.

     

    Mais je refuse de m'attacher à quiconque risquerait de percer mon secret, de découvrir que je suis quelqu'un d'autre.

     

    Je n'ai pas d'amis. Je les repousse, je fuis devant le danger que représen-terait quelqu'un que j'admire, à qui je tiens, comme un frère... et qui un jour, quand je ne m'y attendrai pas, que je baisserai la garde, me fera mal.

     

     

     

    Je me sens seul aujourd'hui.

     

    Pourquoi ça fait si mal ?

     

    N'ai-je pas toujours rêvé de cette indépendance, cette liberté sans entraves ? Ne plus penser aux autres, si mesquins, hypocrites, lâches, sournois, faibles...

     

    Seul, je ne risque rien.

     

    Alors pourquoi, aujourd'hui, cette lassitude, ce dégoût de la vie ?

     

    Comme si plus rien n'avait d'intérêt, de sens...

     

     

     

    Je n'ai pourtant pas toujours été ainsi.

     

    J'ai bien dû aimer la vie pour en arriver là ?

     

    Pourquoi cette boule dans la gorge, cette envie de crier, de pleurer sans raison aucune ?

     

    Depuis quand je résiste ?

     

     

     

    ***

     

     

     

     

     

    Je ne me souviens pas de mon enfance... ou si peu...

     

    L'insouciance, la transparence, le rire, la légèreté, la confiance, l'innocence... c'est si loin tout ça...

     

    Je ne me souviens même pas à quoi ça ressemblait.

     

     

     

    J'aimerais tant me sentir libre...

     

    J'aimerais tant ne plus m'embarrasser de questions, ne plus ressasser sans cesse cette rancune tenace et cette haine venue du fond des temps qui porte son ombre sur chaque sourire.

     

     

     

    « Aide-moi !

     

    S'il te plaît...

     

    Il fait trop noir ici.

     

    Il fait si froid...

     

    Aide-moi !

     

    Je veux ma maman !!! »

     

     

     

    Qui est ce petit garçon qui me fixe de ses yeux sans flamme ?

     

    Il a l'air tellement triste, tellement seul.

     

    On dirait qu'il a peur.

     

    On dirait qu'il souffre.

     

    Il hante mes nuits depuis tellement longtemps...

     

     

     

    Mais pourquoi moi ?

     

    Pourquoi m'appelle-t-il à l'aide comme si j'étais son dernier espoir ?

     

    Pourquoi m'appelle-t-il à l'aide alors que je ne le connais pas ?

     

    Qui est-il ?

     

    Ces yeux vides...

     

     

     

    « Tu sais ce qu'il faut faire.

     

    Tu sais ce qu'il faut dire.

     

    Toi seul le sais.

     

    Toi seul peux me comprendre.

     

    Toi seul sais ce que je ressens.

     

    Toi seul sais ce qui me manque.

     

    J'ai attendu si longtemps que tu m'entendes enfin... »

     

     

     

    A l'évocation de ces mots qui résonnent dans mon esprit, un cyclone d'émotions violentes remonte du fond de mon âme.

     

    Je vomis un torrent de larmes ininterrompues qui me noient et m'abrutissent.

     

    Je ne sais plus qui je suis.

     

    Je ne suis plus qu'une boule de douleur pure.

     

    Une boule de colère, de rage.

     

    Je voudrais hurler, griffer, déchirer ce rideau opaque qui m'empêche de contempler la lumière du monde depuis trop longtemps.

     

     

     

    Je n'ai pu en toucher du doigt qu'un pâle reflet.

     

    Toujours en décalage, toujours en retrait, refusant de participer à cette comédie à laquelle on m'invitait.

     

    Je me voulais fort pour prouver à la vie qu'elle ne pouvait plus m'atteindre.

     

    Je croyais qu'en étouffant l'horreur, celle-ci mourrait...

     

    Je ne pouvais pas deviner que c'est elle qui m'étoufferait.

     

     

     

    ***

     

     

     

    J'aurais tellement aimé vivre... comme tout le monde.

     

    Être heureux... parce qu'on a droit au bonheur sur Terre.

     

     

     

    « Il n'est pas trop tard...

     

    Tu as fait le plus dur.

     

    Le chemin n'est plus très long.

     

    Tu aperçois la lumière au bout ?

     

    Et les silhouettes qui attendent ton retour ?

     

    Ce sont les gens qui tiennent à toi.

     

    Ce sont les gens qui t'aiment.

     

    Accepte de prendre la main qu'ils te tendent.

     

    Même si tu as toujours voulu leur cacher ta douleur, ils ont deviné le petit garçon en toi qu'ils ont essayé de protéger, peut-être trop maladroitement.

     

     

     

    Ne sois pas trop dur avec toi-même.

     

    Prends conscience de la personne incroyablement belle que tu es devenu.

     

    Tu as su la nourrir malgré tout et elle a grandi toutes ces années par ta simple volonté.

     

    Tu as choisi de faire du petit garçon un homme bon malgré tout ce que tu as subi et enduré.

     

    Tu as fait preuve de tant de force...

     

    Merci d'exister. »

     

     

     

     

     

    Le 19 mai 2017

     

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  • « Depuis le jour où je l'avais rencontrée, j'avais été apparemment l'esclave de Tulipe.

     

    L'esclave de Tulipe

     

    Tout ce que j'avais dit, tout ce que j'avais fait, je l'avais dit et fait en pensant à elle. Comme on ramène inlassablement sa langue sur une dent qui bouge, toutes mes pensées me ramenaient toujours à elle. Je ne communiquait pratiquement plus avec mes parents. Je m'étais complètement détachée de Julius. Je n'avais pas d'amis.

    Pendant tout ce temps, je n'avais été disponible que pour Tulipe. » (p.135)

     

    (Mon amitié avec Tulipe d'Anne FINE)

     

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  • « Esteban était malheureux dans sa classe de CP. A cause de Tom Lavadan.

     

    - Il veut toujours jouer avec moi, mais après, il me tape.

     

    Mal au ventre au moment de partir à l'école

     

     

    En discutant avec son frère, Charlie avait fini par conclure qu'il était victime d'une sorte de harcèlement. Tom exigeait qu'Esteban reste avec lui en classe, à la récré, à la cantine, et tout le monde les croyait copains. Mais Tom était imprévisible. Tantôt il s'amusait à soulever Esteban de terre pour lui montrer qu'il était fort, tantôt il le poussait dans le dos ou le cognait contre un mur. Esteban, tétanisé, vivait dans l'attente de ce qui allait lui arriver. Il avait mal au ventre chaque matin au moment de partir à l'école. » (p.10)

     

     

     

    (Papa et maman sont dans un bateau de Marie-Aude Murail)

     

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  •  

    « Tu fais semblant de ne rien voir ?

     

     

    Tu sais, il n'y a rien de plus lâche. Fermer les yeux alors que tu es au courant c'est comme si tu le persécutais avec tous les autres. » (p.82-83)

     

     

     

    (Une sacrée Mamie T.5 de Yoshichi SHIMADA et Saburo ISHIKAWA)

     

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