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Par La Célestine le 25 Août 2017 à 11:26
ça n'se voit pas du tout
« "Les enfants des chômeurs
Des sans-abris, des RMistes
Reçoivent le meilleur
De ce qui passe sur nos listes
Couverts de pied en cap
De vêtements des grandes marques
Fini le handicap
Et bien malin qui les remarque
Ca gêne beaucoup moins
Et quand ils se lavent les mains
Je vous jure, on s'y tromperait
On dirait des enfants, des vrais
Ça n'se voit pas du tout, pas du tout
Ça n'se voit pas du tout
Ces gens dans le métro
Qui nous imposent leur musique
Ou ceux qui parlent trop
En recherchant le pathétique
Jamais vous ne croiriez
Qu'ils sont vraiment ce qu'ils prétendent
Ils sont bien habillés
Y en a qui sentent la lavande
Leur faire la charité
Moi, j'aurais peur de les vexer
Entre nous, et bien franchement
Ils sont pauvres ou ils font semblant ?
Ça n'se voit pas du tout, pas du tout
Ça n'se voit pas du tout
Mon épicier m'a dit
Qu'autrefois dans le voisinage
Il y avait des taudis
Qui déparaient le paysage
Il devait s'y passer
Les choses que l'on imagine
On ne pouvait laisser
Proliférer cette vermine
On les a remplacés
Par des immeubles policés
Ce qu'on a fait des habitants ?
Ils sont relogés depuis longtemps
Ça n'se voit pas du tout, pas du tout
Ça n'se voit pas du tout
Quand ma fille a fauté
J'ai failli la mettre à la porte
Mais j'étais révoltée
A la seule idée qu'elle avorte
Il y a des endroits
Où on peut arranger les choses
Et tout le monde croit
Qu'en ce moment elle se repose
Elle a eu son bébé
Il était bien un peu foncé
Mais tout de même assez mignon
Ça sera mieux pour l'adoption
Ça n'se voit pas du tout, pas du tout
Ça n'se voit pas du tout
Mon fils qui est très beau
Va bien se décider, j'espère
A reprendre le flambeau
De la famille et des affaires
Il n'a pas l'air pressé
De rechercher le mariage
J'ai beau lui présenter
Des jeunes filles de son âge
Il n'y a que des garçons
Qui viennent le voir à la maison
Mais s'il avait des goûts pervers
Je le saurais, je suis sa mère
Ça n'se voit pas du tout, pas du tout
Ça n'se voit pas du tout
Je suis sollicitée
Par les œuvres de la paroisse
Je suis trop occupée
Pour éprouver la moindre angoisse
Je me lève très tôt
Pour attraper la première messe
Puis dans les hôpitaux
Je vais secourir les détresses
Oui, j'aime mon prochain
Et je m'applique à faire le bien
Car j'ai un cœur très généreux
Mais j'ai l'impression, c'est curieux
Ça n'se voit pas du tout, pas du tout
Ça n'se voit pas du tout"
Anne SYLVESTRE – Partage des eaux (2000)
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Par La Célestine le 23 Août 2017 à 10:10
« - Et toi ? T'as quelqu'un ?
- Eum... Je suis pas sûr... je sais pas...
- Comment ça, tu sais pas ?
- Ben, je l'ai embrassé avant qu'il parte en vacances.
- Qu'elle.
- Quoi ?
- Qu'elle. T'as dit qu'il ne parte, c'est qu'elle ne parte.
- Mmmmm.... non.
- OH ! Tu... T'es... Ah ! Euh... Tuuu ?...
- NON ! Enfin... Je sais pas trop...
Peut-être ?
- Héé... C'est pas grave.
C'est même assez cool ! J'ai jamais eu de copain gay.
- Euh, je sais pas vraiment si je...
- Enfin... J'ai jamais eu de copain "peut-être gay ou peut-être pas finalement"...
- Hum !
Merci... » (p.118)
(Simon & Louise de Max de RADIGUES)
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Par La Célestine le 19 Août 2017 à 11:04
«Pendant que je reboutonnais le babygros de Tyler, je me suis brusquement rendu compte que ces gamins étaient sacrément ordinaires. « Ils se conforment aux stéréotypes de leur sexe », dirait Liam. Pardon ? En tout cas je savais qu'on ne prendrait jamais Mirelle pour un garçon, ni Cody pour une fille. Tyler était encore un bébé, alors il ne comptait pas. Si on lui mettait des habits à volants, les gens diraient sans doute : « Quelle jolie petite fille ! » en roucoulant au-dessus de lui.
« Jolie .» Un mot pour les filles. Comme on emploie « beau » pour parler des garçons. Liam avait raison : les gens ne parlent pas des garçons et des filles de la même façon. Ils attendent un comportement différent selon le sexe. Et quand les enfants ont une attitude « hors rôle », comme disait Liam, ils reçoivent l'étiquette de « garçon manqué » ou de « chochotte ».
Il y a des lignes qu'on ne franchit pas, en matière de vêtements, de comportement, d'attitude. Par exemple, si je portais du rouge à lèvres et de la dentelle au lycée, personne ne le remarquerait. Pourtant, ils devraient, parce que je n'ai jamais mis ni l'un ni l'autre. Je ne suis pas très féminine. Les gens acceptent qu'on soit plus ou moins féminine tant qu'on reste du bon côté de cette échelle graduée, ce spectre qui va de « très masculin » à « très féminin » : princesse un jour, souillon le lendemain. Pareil pour les garçons.
Jusqu'à un certain point.
La limite autorisée n'est pas aussi éloignée dans un sens que dans l'autre, sur le spectre. Par exemple, quand on est une fille, on peut être exagérément féminine, ça ne pose pas de problème, mais si on a un comportement ou des sentiments un peu trop masculins, on est une gouine.
Pareil pour les garçons. MUCHO macho, pas de problème. Doux et tendre égale tapette.
Que se passe-t-il quand on est né hors du spectre, entre les deux pôles, comme Liam ? On est un monstre, voilà tout.
Voilà ce que ressentait Liam, je le sais. Un jour, il m'a dit qu'il n'y avait pas de place pour lui sur cette Terre, qu'il ne pouvait s'intégrer nulle part. Il était vraiment hors du spectre. Garçon le jour, fille la nuit. Sauf qu'il était tout le temps une fille au fond de lui. C'était gravé dans son cerveau, disait-il, comme l'intelligence ou la mémoire. Son corps ne reflétait pas son image intérieure. Son corps le trahissait. A cause de la façon dont les gens voyaient Liam – comme un garçon -, il devait se conformer à ce qu'ils attendaient de lui. Se déguiser pour ressembler à son personnage. Jouer ce rôle. Et Liam était doué pour ça, un expert. Il avait eu tant d'années d'entraînement. Ç'avait dû être horrible, cela dit, jour après jour après jour, de voir partout autour de lui ce qu'il voulait être, si désespérément, et ne pourrait jamais être. » (p.81-83)
« Alors quand ? Ça commence quand ? A un moment donné, la société exige qu'on soit comme ci et pas comme ça, et on sait ce qu'elle attend de nous. Comment le sait-on ? Est-ce, genre, une tendance naturelle, innée ? Sommes-nous programmés comme ça ? Peut-être qu'on apprend à observer ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas. Qu'on essaie de s'adapter. Qu'on veut s'intégrer. Qu'on ne peut pas. Est-ce que nos parents nous l'apprennent, font de nous des être conformes ? » (p.83)
« Tout est possible. C'est pas noir ou blanc. Entre le genre masculin et le genre féminin, il y a diverses teintes de gris. » (p.110)
(La face cachée de Luna de Julie Anne PETERS)
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Par La Célestine le 17 Août 2017 à 11:02
« Nos patients souffrent de maladies liées à un traumatisme crânien, de handicaps résultant d'un accident, ou encore de troubles de stress post-traumatique...
Nous les aidons par un accompagnement psychologique et des thérapies de développement. Il s'agit certes d'un lieu d'hospitalisation, mais c'est aussi un établissement où des enfants et des adolescents vivent ensemble. » (p.18)
« Toutefois, je souhaiterais éviter tout malentendu...
Ce que je vous ai décrit là, ce ne sont que des maladies et leurs symptômes ! Ces enfants n'ont pas de problèmes en tant qu'humains. C'est un point très important. » (p.23)
« On porte tous un fardeau dans notre cœur, même si on n'en a pas envie. Et ça on n'y peut rien.
Alors arrête de te faire du mal et accepte-toi tel que tu es, tout entier. C'est probablement la seule solution. » (p.92)
« Avant, je voulais être acceptée par les autres... mais aujourd'hui, je veux être ignorée par la terre entière ! » (p.163)
(Tokyo Kaido, T.1 de Minetarô MOCHIZUKI)
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Par La Célestine le 15 Août 2017 à 17:15
« Je tombe sur un article sur la prostitution masculine au Maroc. Et je pense à Camille.
J'ai été lamentable.
Je lui ai parlé avec la prétention de ceux qui se croient sages parce qu'ils disent tout haut le fond de leur pensée. Comme s'il suffisait d'être sincère pour être habilité à donner son avis. « Si j'avais un
gamin, ça me tuerait de savoir qu'il fait ce que tu fais... »
Comment j'ai pu oser dire ça ?!
Toujours à la ramener, mézigue et ma grande gueule, et mon air doctoral.
Il a vécu du lourd, du méchant, ce gamin. Je repense à la façon qu'il a eue de me dire : « Dans ma famille, on n'aime pas les pédés. »
Je suppose que ses parents ont eu honte de lui et qu'ils l'ont foutu à la porte, comme des clients déçus renvoient la marchandise.
Pas de ça chez nous, merci.
Chez ceux qui sont bornés, la bêtise est sans bornes.
Ils devraient voir son courage, aujourd'hui. Il en faut de la volonté pour supporter tous ces moments sordides, tout en gardant intactes sa détermination et son envie de réussir.
Il habiterait en Thaïlande ou dans les favelas, ce môme, on trouverait son parcours admirable, on ferait des reportages, ça tirerait des larmes. Là-bas, il serait une sorte de héros.
Ici, c'est seulement une pute à homos.
C'est un mec bien, Camille, ce n'est pas si fréquent. Non seulement il m'a sauvé la vie, mais il est allé témoigner au commissariat, au risque de se faire emmerder par les flics sur son emploi du temps et son emploi tout court. Il est venu prendre de mes nouvelles. Et moi...
Moi, je peux toujours critiquer les cons, dans leur équipe je jouerais avant-centre. » (p.114-115)
(Bon rétablissement de Marie-Sabine ROGER)
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Par La Célestine le 13 Août 2017 à 17:35
« Je dois faire honneur à ces prénoms, soutenir tous les jours le regard de mon père et de ma mère qui auraient tellement voulu que je fusse ce garçon fort et baraqué, différent de ma sœur, de mes tantes, de ce gynécée étouffant, et ce, d'autant plus que mon père est fils unique. J'ai honoré autant que j'ai pu ce prénom d'Alex et j'y ai même trouvé du plaisir. Ça m'amusait quand j'étais petite ces « bonjour p'tit gars, comment ça va ?, « il est adorable, votre fils ».
A force de voir papa m'encourager à faire du foot, à force de m'applaudir quand je battais tous les records d'athlétisme ou que j'arrivais à grimper au sommet des réverbères puis à courir plus vite que papa, Manon, ma grande sœur, celle qui avait eu le droit, elle, d'être une fille a cru longtemps que j'étais son petit frère.
Sur les photos de mon enfance, impossible de distinguer si je suis Alexandre ou Alexa. Je n'ai jamais porté de robes, j'ai toujours refusé les maillots de bain deux pièces, je me suis même baignée souvent en tee-shirt. Mes parents ne se sont pas vraiment inquiétés de cette obstination. Ils ne m'y ont pas non plus encouragée. Je dois leur rendre cette justice.
C'est moi qui ai refusé d'être Alexa, qui ai imposé Alex, y compris à mes profs et à tous mes copains, c'est moi qui ai voulu toujours avoir les cheveux ultracourts, c'est moi qui ai voulu devenir la reine du roller. » (p.16-17)
(Rollermania de Brigitte SMADJA)
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Par La Célestine le 11 Août 2017 à 17:40
« écoutez-moi. Je ne prends pas la défense de mon fils. Ce qu'il a fait n'est pas très malin. (…) Donc, voilà, passons. Cette histoire de fauteuil n'a aucun intérêt.
Par contre, ce qui est très important , et je sais que ce que je vais vous dire peut vous sembler choquant, mais j'y crois vraiment, c'est que Valentin, ce matin, s'est bien comporté avec votre fils. Il s'est bien comporté parce qu'il n'a établi aucune différence entre eux deux. Et vous savez pourquoi ?
Mais parce qu'il n'en voit pas, j'imagine.
Maxime, pour Valentin, n'est ni faible ni vulnérable . C'est un gamin exactement comme les autres et qui doit donc subir la même dure loi de la cour de récréation que les autres. Il n'a pas fait de discrimination ni même de discrimination POSITIVE comme nous disons, nous adultes qui cherchons toujours à tout discriminer. Non, il l'a traité en égal. Pour des raisons que nous ignorons, et qu'il faut ignorer var les secrets d'enfant sont sacrés, Valentin a eu besoin de s'en prendre à votre fils. S'il avait pu, il l'aurait brutalisé, lui aurait fait un croche-pied, donné un coup dans l'épaule ou que sais-je encore, mais comme il ne le pouvait pas, il s'en est pris à son fauteuil. C'était de bonne guerre.
C'était de bonne guerre et je dirais même : c'est sain.
Nos enfants s'envisagent sur un pied d'égalité et nous avons tort (…) d'accorder une si grande importance à un événement aussi banal. Si Valentin s'était empoigné avec un autre gamin dans la cour (…) auriez-vous convoqué ainsi les parents en simulant une espèce d'état d'urgence ?
Non. Bien sûr que non. L'adulte qui les surveillait les aurait séparés et voilà tout. Et bien là, c'est pareil. C'était un simple croche-pied, ni plus ni moins. (…)
Je vous le redis, je n'excuse pas mon fils, je ne l'excuse pas et je souhaite aussi qu'il soit puni, mais je maintiens que loin d'humilier le vôtre, il lui a, en crevant sa roue, rendu honneur. » (p.170-171)
(Fendre l'armure d'Anna GAVALDA)
2 commentaires -
Par La Célestine le 9 Août 2017 à 17:45
« Du coup, on nous regardait comme des bêtes curieuses, ou pas du tout. Je crois qu'aux yeux des autres lycéens, on faisait un peu pitié. On dit que la musique adoucit les mœurs, mais je crois que c'est parce qu'elle est faite par des gens plutôt doux, au départ, qui vont vers elle par besoin de douceur, par fragilité. Et cette douceur, cette fragilité, comme la culture, la sensibilité au beau ou la bonne éducation sont tout sauf un atout dans la jungle d'un lycée. » (p.114)
« C'est une règle universelle, les mecs cool détestent les coincés, et vice versa. Sauf que les cool ont le mépris cool justement, détendu et élégant, alors que les coincés le sont encore plus quand ils sont en présence de quelqu'un qui ne l'est pas ! » (p.161)
« Je sentais monter en moi une humeur que je connaissais trop bien. J'étais en train de m'exclure de la soirée, de me refermer à double tour, d'endosser le rôle du mec différent qui se tient à l'écart parce que c'est dans sa nature profonde. Ben voyons ! J'aurais adoré être ce type que je voyais en train de faire rire deux filles, ou cet autre qui dansait, yeux fermés, un verre à la main tenu par le dessus entre ses doigts, ou celui-là encore, entouré d'une grappe de filles, qui se roulait un pétard. Mais moi, j'étais celui qui ne se sentait jamais à sa place et qui essayait, en vain, de se convaincre que c'était parce que l'attendait un destin extraordinaire. » (p.166)
« J'ai compris ce soir-là ce que j'aimais chez ma tante. C'était qu'elle ne m'avait jamais traité comme un enfant, ni comme un adolescent. jamais elle ne m'avait demandé comment allait l'école, si j'avais une amoureuse, ce que je voulais faire plus tard. Avec elle, je n'avais même pas l'impression d'être son neveu, mais moi-même, tout simplement. Un individu qu'elle prenait tel qu'il était. S'il était très difficile à quelqu'un qui ne la connaissait pas de lui donner un âge (sans même parler de ses tenues vestimentaires hors d'âge et de modes), c'était parce que le temps n'avait pas de prise sur elle car pas d'importance. Et du coup, il en allait de même pour l'âge des personnes qu'elle fréquentait. Elle s'en moquait et se comportait de la même façon avec tout le monde, ne cherchant à plaire à personne, ni professionnellement (...), ni amicalement, ni amoureusement. Elle ne jouait pas à la vie comme nous tous, et cela faisait d'elle un être reposant. et sans doute plus libre malgré ses airs coincés que bon nombre d'entre nous qui passons notre temps à vouloir démontrer aux autres combien nous le sommes. » (p.189-190)
(Le monde dans la main de Mikaël Ollivier)
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Par La Célestine le 3 Août 2017 à 16:44
« C'est depuis la famine, depuis que les troupeaux sont décimés et qu'on se bat à mort pour une poignée de mil, qu'Okoboé s'est trouvé en danger. Un soir, il est venu comme à son habitude s'asseoir avec les hommes mais personne ne lui a adressé la parole. Cela l'a alerté. Depuis un bout de temps déjà, ce renard de Songa, qui passe son temps à consulter les esprits, le regardait d'un air trop doucereux et Okoboé s'est retrouvé peu à peu au centre des regards.
Adouna a saisi les coups d'oeil obliques sur son homme, elle les a repérés quand ils ont dévié sournoisement sur elle et sur son enfant. Alors elle a su qu'un grand oiseau noir planait au-dessus d'eux. Et les nuits l'ont trouvée sans sommeil. Elle pensait, les yeux grands ouverts, à l'oiseau de la haine qui planait, planait sans se lasser, toujours en éveil. Elle n'osait plus fermer les yeux : l'oiseau noir n'attendait que cela, qu'ils oublient et ferment les paupières.
Adouna n'avait même pas envie de pleurer. Elle se rappelait seulement, comme d'un instant d'intense clarté, le jour où son père l'avait conduite jusqu'à la maison de son fiancé :
- Je te donne ma fille, Okoboé. Prends-en soin, comme un homme doit prendre soin de sa femme. Que notre famille remplace celle que tu as quittée.
Tout le monde avait entendu ces paroles et personne n'avait protesté. On avait dansé trois jours pour fêter comme il convenait le mariage d'Adouna, fille dernière de Zarza, avec Okoboé, l'homme bleu.
Le Touareg était devenu un homme du peuple zarma. Il avait pris ses repas avec la famille, il s'était occupé des ânes, des ovins et des quelques vaches que ces familles d'agriculteurs entretenaient sans conviction. Il avait construit des murs de pisé, réparé les toits, creusé des rigoles d'irrigation. Jamaius durant ces années de bonheur, personne n'avait été le témoin du moindre conflit entre Zarza, ou quiconque au village, et Okoboé. Il avait la peau claire, cela faisait rire les hommes quand ils voulaient le plaisanter puisqu'ils ne trouvaient rien à lui reprocher. Okoboé avait l'âme droite et l'estime de Zarza, son beau-père, dont la parole comptait dans le village.
Sans doute Adouna n'aurait-elle jamais pris la décision de partir si son père avait été encore là.» (p.8-9)
« Merveilleuse Adouna ! Elle avait le cœur aussi large que celui de son père. Okoboé lui savait gré d'avoir pris d'elle-même la décision qu'il n'osait pas lui proposer : partir vers le Nord, retourner au pays touareg en espérant que le destin y serait plus favorable. Elle n'avait pas hésité, elle avait laissé sa tribu derrière elle, chassant sans doute l'espoir de revoir un jour les siens. « Des oiseaux qui émigrent, aimait à dire Zarza, aucun ne sait se réhabituer à son ancien nid. » Elle allait être une étrangère, sentir le regard défiant d'une autre famille. Saurait-elle l'apprivoiser ? (p.12)
« Adouna se savait moins faite pour la route que son homme. Elle n'avait aucun attrait pour les transhumances ni pour les caravanes. Comme il avait fallu que son nomade s'attache à elle pour demeurer de longues années auprès de Zarza et des siens, dans un village d'agriculteurs ! C'était pour elle, encore aujourd'hui, source d'émerveillement. Okoboé ne connaissait depuis sa tendre enfance que la carte des puits, le tracé des oueds et le nom des montagnes. Il concevait la vie comme une longue piste à parcourir. Elle voyait l'existence, au contraire, comme une ferme entourée de champs cultivés, un immense damier de verdure inscrit dans la boucle d'un fleuve et qu'on peut contempler à loisir, saison après saison, du sommet des collines. » (p.80)
(Issa, enfant des sables de Pierre-Marie BEAUDE)
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Par La Célestine le 25 Juillet 2017 à 16:28
« - Jamais mon connard de père ne ferait une chose pareille. Je suis sûre qu'il n'a jamais tenu de journal de toute façon.
- Qu'est-ce que tu en sais ?
- Il pense que c'est pour les femmes ou les tapettes, tu vois le niveau.
- tu l'as prévenu que j'avais un blog, et que donc, je suis une tapette électronique ? » (p.76)
(Blog de Jean-Philippe BLONDEL)
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