•  « Elle sait qu’ici, dans son pays, les victimes de viol sont considérées comme les coupables. Il n’y a pas de respect pour les femmes, encore moins si elles sont Intouchables. Ces êtres qu’on ne doit pas toucher, pas même regarder, on les viole pourtant sans vergogne. On punit l’homme qui a des dettes en violant sa femme. On punit celui qui fraye avec une femme mariée en violant ses sœurs.

    Le viol comme arme de destruction massive

    Le viol est une arme puissante, une arme de destruction massive. Certains parlent d’épidémie. Une récente décision d’un conseil de village a défrayé la chronique près d’ici : deux jeunes femmes ont été condamnées à être déshabillées et violées en place publique, pour expier le crime de leur frère parti avec une femme mariée, de caste supérieure. Leur sentence a été exécutée. » (p.91)

       

    (La tresse de Laetitia COLOMBANI)

      

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  • "Il essayait de trouver une façon d'exprimer à Jerry le lien entre Frère Eugène, la salle dix-neuf et le fait de ne plus jouer au football. Il savait qu'il y avait un lien mais c'était difficile à exprimer.

     "Ecoute, Jerry. Il y a quelque chose de pourri dans cette école. Plus que pourri." Il chercha le mot et le trouva, mais ne voulut pas l'utiliser. Ça n'allait pas avec le paysage, le soleil et le bel après-midi d'octobre. C'était un mot de l'ombre, qui allait avec le vent d'hiver.

     "Les Vigiles ?" demanda Jerry. Il s'était allongé sur la pelouse et regardait la course des nuages dans le ciel bleu d'automne.

     "ça en fait partie", dit Cacahuète. Il aurait voulu courir encore. "Le mal", dit-il.

     "Qu'est-ce que tu as dit ?"

     Dingue. Jerry allait croire qu'il avait perdu le nord. "Rien", dit Cacahuète. "De toute façon, je ne vais plus jouer au football. C'est personnel, Jerry." Il prit une profonde inspiration. "Et je ne vais pas non plus courir le printemps prochain."

     Ils se turent.

     "Qu'y a-t-il, Cacahuète ?" finit par demander Jerry, d'un ton ému rempli d'inquiétude.

     

    "C'est ce qu'ils nous font, Jerry." C'était plus facile à dire parce qu'ils ne se regardaient pas, chacun assis à sa place. "Ce qu'ils m'ont fait cette nuit-là dans la classe...  je pleurais comme un bébé, ce que je ne me serais jamais cru capable de faire. Et ce qu'ils ont fait à Frère Eugène en détruisant sa salle, en le détruisant lui..."

     

    "Allons, t'inquiète pas, Cacahuète."

     "Et ce qu'ils te font à toi...  les chocolats."

     "Ce n'est qu'un jeu, Cacahuète. Prends ça comme une blague. Laisse-les s'amuser. Frère Eugène devait sans doute être au bord de..."

     

    C'est plus qu'une simple blague

    "C'est plus qu'une blague, Jerry. Quelque chose qui peut te faire pleurer et faire partir un professeur... le faire basculer... c'est plus qu'une simple blague." (p.130-131)

     

      "Jerry pensa qu'il comprenait le sens du geste de janza – Janza brûlait de l'envie d'agir, de toucher, de se battre. Et il devenait impatient. Mais il ne voulait pas commencer le premier. Il voulait pousser Jerry à le faire, c'est ainsi qu'agissaient ceux qui brimaient les autres, pour se sentir innocents après le délit. C'est lui qui a commencé, clamaient-ils." (p.173)

       

    (La guerre des chocolats de Robert CORMIER)

      

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  • "Il était question d'un congrès en province et d'un dîner très arrosé. Ils s'étaient attardés dehors avec quelques collègues, tous très éméchés, lorsqu'une jeune femme qui avait participé au colloque, mais qu'ils ne connaissaient pas, était passée devant eux. L'un d'eux l'avait interpellée, pour rigoler.

     "...tu peux me croire qu'elle serrait les fesses !" a-t-il lancé au moment où je revenais pleinement à la conversation.

     Tout le monde a ri. Les femmes aussi. Je suis toujours étonnée que les femmes rient à certaines blagues.

     - Ah bon, l'ai-je interrompu, elle serrait les fesses ? Cela te surprend ?

     Je ne lui ai pas laissé le temps de répondre.

     - Tu veux que je t'explique pourquoi ?

     Il regardait les autres l'air de dire : voilà, de quel genre de femme le destin m'a affublé.

     - Parce que vous étiez quatre mecs bourrés dans une zone d'activité déserte, pas loin d'un hôtel Ibis ou Campanile quasiment vide. Eh bien oui, William, cela fait sans doute partie des différences essentielles entre les hommes et les femmes, fondamentales, même : les femmes ont de très bonnes raisons de serrer les fesses.

     (...)

    Cela te surprend ?

     

    Je me suis adressé à William mais aussi aux deux autres hommes de l'assemblée.

     

    - Est-ce que vous serrez les fesses lorsque vous croisez un groupe de jeunes filles manifestement ivres en pleine nuit ?

     

    Le silence épaississait à vue d'oeil.

     

    - Eh bien non. Parce que jamais aucune femme, même ivre morte, n'a posé sa main sur votre sexe ou vos fesses, ni accompagné votre passage d'une remarque à caractère sexuel. Parce qu'il est assez rare qu'une femme se jette sur un homme dans la rue, sous un pont, ou dans une chambre pour le pénétrer ou lui enfoncer je ne sais quoi dans l'anus. Voilà pourquoi. Alors sachez que oui, n'importe quelle femme normalement constituée serre les fesses lorsqu'elle passe devant un groupe de quatre types à trois heures du matin. Non seulement elle serre les fesses mais elle évite le contact visuel, et toute attitude qui pourrait suggérer la peur, le défi ou l'invitation. Elle regarde devant elle, prend garde à ne pas presser le pas, et recommence à respirer quand enfin elle se retrouve seule dans l'ascenseur." (p.144-146)

       

    (Les loyautés de Delphine de VIGAN)

      

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  •  

    "Comme beaucoup de Français, je ne sais pas grand-chose des Roms.

     

    Quelle est leur origine géographique ? Pourquoi fuient-ils leur pays ? Pourquoi s'installent-ils en France, là où ils sont si mal reçus ?

     

    Manon Fillonneau, déléguée générale du Collectif National des droits de l'Homme / Romeurope :

    "Les Roms représentent 8 à 10% de la population roumaine et 7% de la population hongroise. Mais ils sont aussi présents en Bulgarie, en République Tchèque, en Turquie, en Serbie, au Kosovo...  En fait, le terme "rom" signifie "homme" en langue romani.

     

    Entre 15 000 et 20 000 personnes originaires des pays de l'Est vivent en bidonville en France : environ 90% sont des Roumains. Mais il s'agit aussi bien de Roms roumains que de Roumains précaires." (p.63)

     

     

     

    "Elena n'a pas eu affaire au racisme en France. Pourtant, concernant les Roms,  les préjugés ont la vie dure. Cela ne date pas d'hier : depuis longtemps, dans l'imaginaire collectif, les Roms traînent une image de voleurs, de "faiseurs d'histoires".

     

    On les croit nomades alors que l'habitat en bidonville n'est pas un choix mais une nécessité... (...)

     

    On imagine qu'ils ont "déferlé" sur l'Europe de l'Ouest et notamment la France. Or, dans les faits, ils représenteraient en France 1 à 2% des Roms de Roumanie. Et depuis 2005, ce chiffre est relativement stable. Il n'y a donc pas d'"invasion" rom.

     

    On imagine aussi que les Roms exploitent leurs enfants en faisant la mendicité avec eux. Mais c'est parce qu'ils n'ont pas le choix. Laisser un enfant dans un bidonville toute une journée ? C'est impossible pour les parents et ce serait très dangereux !" (p.76-77)

     

     

     

    "Les politiques, de droite comme de gauche, confondent volontiers Roms et "gens du voyage" et les accablent de tous les maux. Ils constituent une parfaite excuse pour mener des politiques sécuritaires plus dures.

     

    Les Gens du Voyage que l'on appelle parfois Gitans, Manouches ou Forains, vivent en France depuis très longtemps. Bien que citoyens français depuis des générations, jusqu'à peu, ils n'avaient pas droit à une carte d'identité." (p.78)

     

     

     

    ("Mes voisins roms" par Joséphine LEBARD et Julien REVENU in TOPO n°12)

     

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  • «La danse quotidienne des normes et des stéréotypes nous rappelle à quel point le corps est politique. Tout comme nos ébats amoureux. Le couple hétérosexuel monogame, blanc, beau et à l’éternel sourire de dentifrice, reste dans l’inconscient collectif le schéma souverain de l’état amoureux. Où sont les autres réalités ? Où est la mienne ?

      

     Courtes-pattes, grassouillets, colorés, androgynes, trans, scarifiés, malades, handicapés, vieux, poilus, hors-critère-esthétique...  Pédés, gouines, travelos, freaks, inconstants, cœur d'artichaut, multi-amoureux et aventuriers, nous écrivons nos propres poèmes, vibrons à travers nos propres romances. Nous ne sommes pas une minorité, nous sommes les alternatives. Car il y a autant de relations amoureuses qu'il y a d'imaginaires.

     

    Ce recueil est un échantillonnage de notre palette. Si mon crayon n'arrive pas à retranscrire le goût des larmes, du silence férocement bruyant d'un coeur qui éclate, ni de tout l'épiderme qui se soulève dans une bouffée d'extase, que ce livre soit au moins un hommage rendu aux êtres amoureux qui vont à contre-courant de ce qui est attendu d'eux, parfois au péril de leur vie. »

       

    (Préface de Julie MAROH à son livre Corps sonores)

     

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